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Deuxième table-ronde : le point des élu·es sur la démocratie locale 

Armelle Danet : Nous allons reprendre sur un des thèmes qui intéresse particulièrement Elles aussi, c’est le point de vue des élus sur la démocratie paritaire locale.  J’ai trois intervenant.es :  Reine Lepinay, Edith Gueugneau et Eric Kerrouche.

Reine, tu co-présidente d’Elles aussi, tu es membre de la commission Parité du HCE, tu as été 2ème adjointe au maire d’Ecully dans le Rhône, chargée de l’urbanisme et des grands projets. Tu vas nous présenter les principales conclusions du rapport du HCE qui es paru en février 2022. 

Madame Edith Gueugneau vous êtes maire de Bourbon-Lancy en Saône-et-Loire depuis 2014, une ville de 4700 habitants ; vous avez une longue expérience de présidente d’intercommunalité car vous avez été élue de 2009 à 2020 et vous avez connu plusieurs fusions ; actuellement vous êtes première viceprésidente de la Communauté de Communes entre Arroux, Loire et Somme après en avoir été la présidente ; vous avez été également députée de 2012 à 2017 et vice-présidente de la région Bourgogne.

Monsieur Eric Kerrouche, vous êtes sénateur depuis 2017 et vice-président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation.  Nous avions fait votre connaissance en 2014, à ce moment-là vous étiez président de la Communauté de communes de Maremne Adour Côte-Sud, dans les Landes, ceci de 2008 à 2017 ; vous avez également été conseiller régional de 2015 à 2017 et vous êtes docteur en Sciences politiques et directeur de recherche au CNRS.

 Je vais donner la parole d’abord à Reine pour qu’elle présente les recommandations du rapport du HCE et ensuite je poserai quelques questions à Madame Gueugneau et Monsieur Kerrouche.

Reine Lepinay : Ce rapport fait suite à un rapport publié en 2018 sur la parité dans les intercommunalités, c’est dire que nous avons travaillé depuis un certain temps sur ce sujet-là et ce rapport de 2018 a favorisé la mobilisation d’associations dont l’AMF, où Edith Gueugneau a fait partie du groupe de travail, il y avait aussi l’AdCF, Villes de France, etc….

Depuis quelques temps déjà nous sommes membres de la commission Parité et ce rapport fait suite à la promulgation de la loi du 27 décembre 2019 où dans son article 28 il fallait absolument modifier le code électoral pour fin 2021 ; inutile de vous dire que les choses ne se sont pas passées comme prévu. Ce rapport je vais vous le présenter très rapidement. C’est un bilan avec 6 observations et puis 20 recommandations qui sont distribuées sur 5 axes. Le bilan, c’est clair, vous avez remarqué tout à l’heure avec les chiffres que nous vous avons donnés, les histogrammes que vous avez pu voir, il y a eu certes quelques avancées, mais aujourd’hui la parité effective n’existe pas, le pouvoir est toujours entre les mains des hommes. Donc sur ces 6 observations la première est que la parité numéraire est presque atteinte dans les communes de plus de 1000 habitants mais les hommes continuent de dominer la vie politique locale aux postes décision. On a pu s’en rendre compte lorsque qu’Elles aussi a mené des études qualitatives sur les binômes départementaux, on a vu quand même que ceux qui tiennent les cartes, ceux qui jouent dans le jeu politique, ce sont encore les hommes. Donc il y a une cloison de verre ou une paroi de verre avec des délégations stéréotypées, et il y a un plafond de verre avec la grande difficulté d’atteindre les plus hautes fonctions de pouvoir. La deuxième observation ce sont les communes de moins de 1000 habitants, les EPCI, ce sont les zones blanches.  Troisième observation : un sexisme systémique persistant en politique, sous différentes formes effectivement, du plus anodin au plus grave avec parfois du sexisme très paternaliste, mais du sexisme, pleinement ; donc c’est un monde politique, comme on l’a compris tout à l’heure, qui s’est construit sur un imaginaire historiquement masculin avec des règles implicites qui obéissent à des codes et des valeurs socialement construites et, comme telles, perpétuées par les médias. C’est ce qu’on a vécu tout à l’heure avec vous, mesdames.  La quatrième observation : le partage des délégations entre les femmes et les hommes, toujours des délégations très très stéréotypées qui persistent , que ce soit dans les fonctions d’adjoint ou d’adjointe ou dans les fonctions de vice-président·e à l’intercommunalité ; et c’est vrai que là c’est très important parce qu’ on va remarquer que certaines délégations  permettent de développer  des réseaux de préparer l’avenir politique et que d’autres délégations ne permettent pas cela, et comme par hasard,  les délégations du « care » ça ne prépare pas l’avenir politique alors qu’une délégation aux travaux ou à autre chose, cela crée  bien entendu des réseaux, des appuis et cela c’est très important parce que cela conditionne l’avenir ; le temps que les femmes vont rester en politique, et on se rend compte que souvent elles font un petit tour et puis s’en vont ; et puis bien sûr les jeux politiques des élus hommes qui sont en place et qui sont dans la stratégie politique en permanence dès le moment  où ils ont été élus, pour préparer l’élection d’après. Cinquième observation un manque de volonté politique mais cela on l’avait compris, vu ce qui s’est passé en cinq ans malgré un discours très ouvert sur ces idées de parité. Une sixième observation : aucune contrainte sur l’évaluation des politiques publiques d’égalité, c’est ce que l’on a un petit peu évoqué tout à l’heure ; et bien évidemment et on manque de données fiables, nous l’évoquons très souvent au HCE, cela mériterait que l’on avance un peu plus sur ce sujet.

Cinq axes de réforme pour le HCE : premier axe, réformer le code électoral, je ne vais vous donner toutes les recommandations, j’en ai choisi deux pour chaque axe.  Pour le premier axe, la recommandation 1, c’est abaisser le seuil paritaire des communes dès le premier habitant, d’ici dix ans ; la recommandation 2, c’est réformer le mode de désignation des conseils communautaires et leurs exécutifs et là rien ne s’est passé, tout est à faire, donc nous avons de quoi se mobiliser.  L’axe 2 c’est de réformer le statut de l’élu et assurer la présence des femmes en politique, deux recommandations peut-être à retenir parmi les autres : promouvoir la formation des femmes en politique pour renforcer leur capacité à résister aux réflexes sexistes, on en parlait tout à l’heure, comme quoi tout se tient, il y a une cohérence entre ce travail qu’on a pu faire et ce que l’on entend, (parce que finalement le HCE, c’est cela, récupérer des informations de part et d’autre et ensuite construire des recommandations), et aussi pour affirmer leur sentiment de légitimité, parce que le sexisme détruit ce sentiment et les femmes ne se sentent pas à la hauteur ; la recommandation suivante, ce serait de conditionner, mais elle en a parlé tout à l’heure Sylvie Pierre-Brossolette, notre présidente du HCE,  conditionner les subventions aux partis politiques à des engagements paritaires internes parce que tant qu’il n’y aura pas dans les services internes des partis autant de femmes que d’hommes, le jeu politique restera toujours masculin, particulièrement lorsqu’il faudra désigner des candidats ou des candidates à certaines fonctions et à certaines  élections.  L’axe trois, la lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans le milieu politique : intégrer une séquence sur l’égalité femmehomme à la formation obligatoire de base pour les élus, c’était une idée forte du HCE, une autre recommandation, c’est rendre systématique la peine complémentaire d’inéligibilité des élus condamnés pour violence. Il faut en finir avec la violence. Il faut commencer par cela car sinon on commence à être plus nuancé selon que cela nous concerne ou pas, on l’a vu avec l’actualité récente, branchée là-dessus.  Axe 4 :  Garantir une meilleure représentation des femmes politiques, donc confier au CSA le soin de veiller au respect de la parole équitable ; prévoir l’existence d’une délégation à l’égalité femme-homme dans les communes et les intercommunalités ; pourquoi ça n’existe pas, ça devrait, partout. Axe 5 :  comptabiliser, outiller, fixer des objectifs en matière de parité locale, c’est justement prévoir l’obligation du vote du rapport sur la situation en matière d’égalité pour les collectivités, on avait dit à partir du 10 000 habitants ; veiller à la cohérence des dispositifs paritaires  et faire un suivi et un contrôle, sinon cela n’a pas de sens.  Je vous remercie. Vous voyez que l’esprit des recommandations de ce rapport relève de mesures coercitives et incitatives afin d’agir à la fois dans un temps court car il faut aller vite, et un temps long parce qu’il faut faire bouger des mentalités.  

 Armelle Danet : Maintenant nous allons voir comment cela se passe sur le terrain. Je vais commencer par Madame Gueugneau. Je vais avoir 2 phases de questions. Dans un premier temps je vais vous demander d’intervenir sur deux thèmes ; d’abord vous allez parler du groupe de travail qui été créé en 2008 et que vous avez co-présidé à l’Association des Maires de France, une association  dominée encore largement par les hommes, et là, votre mission était de promouvoir les femmes dans des exécutifs locaux ;  ensuite vous parlerez de votre expérience de présidente et de première vice-présidente d’intercommunalité , en particulier de la complexité à constituer un exécutif et, dans le cas de votre intercommunalité, de la mission presque impossible de de le rendre paritaire ; et forte de cette expérience qu’est-ce qu’il faudrait faire pour avancer. 

Edith Gueugneau : Je voulais remercier les deux co-présidentes, saluer Madame la sénatrice, Monsieur le sénateur, Mesdames les députées. Effectivement au sein de l’AMF, on s’était aperçu que pour son centième congrès il n’y avait jamais eu de forum fait par les femmes ; donc on a demandé au président Monsieur Baroin si c’était possible de mettre en place un forum sur les droits des femmes, sur les violences faites aux femmes. C’était tout nouveau mais on a eu beaucoup de succès, et puis nous avons réitéré ce forum chaque année et nous avons créé un groupe de travail où on faisait des réunions régulières en espérant faire bouger des lignes. Même si on l’a fait ensemble, les lignes n’ont pas beaucoup bougé. On a essayé de mobiliser, on est allé faire des auditions au Sénat, à l’Assemblée nationale à la Délégation aux droits des femmes où nous avons été extrêmement entendues et soutenues. Pour les élections municipales, l’objectif était que l’on puisse effectivement faire abaisser le seuil paritaire dès le premier habitant ; alors au départ on nous avait dit peut-être 700, 500, enfin voilà. Moi je suis une élue rurale puisque j’habite en Saône-et-Loire en Bourgogne et vous savez on a plein de petits villages et il y a autant de femmes que d’hommes et il n’y a pas de raison que les femmes ne soient pas représentées de la même façon que les hommes, il n’y a aucun souci pour que les femmes veuillent s’engager, sauf que ce sont des idées reçues, peut-être en 2014 il y avait un petit peu plus de réticence, en 2020 les femmes se sont engagées ; mais les maires sont restés quand même majoritairement des hommes. Donc effectivement nous n’avons pas abouti, mais nous continuons, on remet ce groupe de travail en route, il faut que l’on puisse rencontrer le nouveau président de l’AMF et voir quelle est sa feuille de route. Toutefois je reprends ce que le Président de la République avait évoqué, que la grande cause de son premier quinquennat était l’égalité femme-homme, également les violences intrafamiliales, je crois avoir compris qu’il veut continuer dans ce sens-là mais à un moment donné il faut qu’il y ait une volonté politique et la volonté politique c’est quand même le Président de la République qui doit l’impulser avec sa Première ministre. 

En ce qui concerne les intercommunalités, j’ai un bon parcours, cela fait bientôt 30 ans, c’est un anniversaire aussi, j’ai commencé en pointant conseillère municipale,  j’ai créé la dernière intercommunalité du département de Saône-et-Loire parce que nous avions des élus hommes qui ne voulaient pas de l’intercommunalité ; et comme moi j’étais première adjointe ils se sont saisis de ça pour dire « on veut que cela soit toi qui soit la présidente de la Communauté de Communes » parce qu’ils ne voulaient pas avoir le maire de la commune la plus importante. Donc vous voyez J’ai servi à quelque chose quand même ! Je pense que je faisais le consensus, j’étais quand même connue et peutêtre appréciée. Ensuite j’ai fusionné avec une deuxième Communauté de communes où il y avait peu d’habitants et là aussi je suis devenue présidente de la Communauté de Communes, mais à chaque fois ce sont les élus qui sont venus me chercher. Je ne me suis jamais imposée. Par la suite je me suis effectivement imposée en menant une liste aux élections municipales pour devenir maire de ma commune. Je voulais rebondir par rapport à ce que Madame a dit, que c’était compliqué, alors moi j’ai eu la chance de toujours gagner, donc c’est une chance, mais il faut aussi se préparer à perdre et quelque part si vous étiez entourée d’un parti, ou bien entourée, vous ne portiez pas seule la défaite. 

Réponse à une intervenante de la salle qui s’était sentie toute seule durant sa campagne, qui avait subi une cabale : j’ai mené plusieurs campagnes, effectivement il faut aussi connaître les codes, les rouages, les stratégies politiques. Je vais vous donner un exemple quand j’ai été élue députée. C’était le moment de la parité, il y avait 5 circonscriptions en Saône et Loire, deux étaient dédiées aux femmes, on est venu me chercher « Edith on te connait bien, c’est pour toi, il faut y aller ». Je faisais partie du Parti socialiste et en juillet j’ai donné mon feu vert ; en fin d’année avec les accords avec Europe écologie, on m’a dit que ce n’était plus possible, que ce serait un candidat d’Europe Ecologie. Mais j’ai tenu bon, j’étais quand même très soutenue, je me suis présentée, j’y suis allée en dissidence car j’ai été exclue du parti. De plus, peu de militants d’Europe écologie en Charolais et dans la circonscription, et en plus on avait parachuté un candidat, j’ai donc été grandement élue. Il y avait beaucoup de cabales, beaucoup de choses qui ont été dites, mais à un moment donné il faut avoir la foi, il faut avoir la conviction, il faut tenir bon.  J’ai fait deux élections de mandat de maire, j’avais trois listes d’opposition, j’ai gagné parce qu’il faut avoir sa feuille de route, il faut être droit, connaitre ses dossiers, et puis voilà je pense que ça passe.

Pour le problème de l’intercommunalité, aujourd’hui comment faire une assemblée paritaire ou un exécutif paritaire lorsque vous avez une majorité de maires. La loi NOTRe a fait un frein extraordinaire puisque dans les petites communes il y a un seul délégué, donc c’est le maire, qui est un homme. Dans l’intercommunalité aujourd’hui il y a des décisions de territoire et je ne sais pas comment ça se passe ailleurs, mais bien souvent l’intercommunalité n’est pas très bien vue sur nos territoires. J’ai des élus qui vont à reculons dans les assemblées intercommunales parce qu’entre les ordures ménagères entre le PLU, l’OPAH, des compétences que l’État nous a gentiment données, ça ne passionne pas les foules et c’est très administratif et que quelque part je pense que c’est plus intéressant de travailler sur des projets dans une commune, de s’investir dans sa commune, que d’être au Conseil intercommunal. Donc c’est très difficile. Il faut absolument que l’on arrive à avoir plus de binômes femme maire- adjoint parce que logiquement avec votre premier adjoint c’est quand même un binôme de confiance et effectivement là cela pourrait peut-être faciliter les choses, mais aujourd’hui moi je n’ai pas de solution. Je pense que l’objectif c’est que les femmes s’engagent davantage, deviennent maires aussi, et puis pour les femmes qui sont hésitantes je crois qu’il y a un volet formation important. Avant de s’engager il faut vraiment connaître les rouages. Pour tout ce qui est du sexisme, il faut répondre du tac au tac, il ne faut rien laisser, il faut ne rien lâcher, il faut que les femmes s’imposent, il faut que les femmes osent et elles ont toutes les compétences pour le faire, il n’y a pas de souci, elles connaissent leurs dossiers, elles travaillent. Moi je suis très optimiste pour que les femmes s’engagent et qu’elles connaissent les dossiers. Par contre la question ne se pose pas de la même façon pour les hommes. 

 Armelle Danet : Monsieur Kerrouche, vous allez nous donner le point de vue du législateur sur la parité dans le bloc communal. Avant fin 2021, une réforme du mode de scrutin pour les communes et leurs regroupements aurait dû avoir été votée, mais il n’en a rien été, d’où votre proposition de loi du 27 octobre 2021. Parlez-nous de cette proposition et, à quelle échéance à votre avis, pourrait-on avoir une réforme pour une parité réelle.

Eric Kerrouche : Merci beaucoup aux co-présidentes pour leur invitation, je travaille régulièrement avec Elles aussi. Ce soir, j’ai l’impression d’être une femme dans une assemblée intercommunale (rires dans la salle). C’est à peu près le même sentiment, sauf que vous avez vu, je suis un homme et je suis déjà à la tribune. Tout à fait sérieusement, avant de commencer, juste très vite, quelques points. Il y a une construction sociale du rôle de la femme élue comme il y a une construction sociale du rôle de la femme tout court. La femme, c’est Vesta, c’est la déesse du foyer, et le feu sacré du foyer est dans le foyer, il n’est pas ailleurs : ainsi, élues, les femmes ne pourraient donc s’occuper que de certaines thématiques. On voit aussi que dans les prises de parole – cela a été évoqué tout à l’heure – il y a des stratégies complètement différentes selon que l’on est un homme ou une femme, on ne se comporte pas de la même façon et on le voit dans tous les conseils et dans toutes les assemblées, les femmes interviennent à la fin, une fois qu’il y a une hiérarchie implicite d’homme qui s’est exprimé préalablement. 

Deux points néanmoins, les femmes élues ne sont pas plus représentatives des femmes que ne sont les hommes élus des hommes. Ce que je veux dire par là, c’est que même au sein des femmes, ce ne sont pas toutes les femmes qui sont représentées dans les élues et il faut travailler à ce biais de représentation de la même façon qu’il faut y travailler pour les hommes. Arrivent aussi quelques blocages, des visions du rôle de la femme dans la politique qui ne sont pas les mêmes chez toutes les femmes politiques. J’ai fait une petite statistique toute simple, il y a 122 femmes sénatrices en 2020, sur ces sénatrices, 93 d’entre elles soit 76 % veulent qu’on les appelle « sénatrice » mais il y a 24 % d’entre elles qui veulent sur leur fiche qu’on les appelle « sénateur » et en l’espèce, la distribution est très marquée politiquement. 

Intervention d’Hélène Conway-Mouret, sénatrice :  je m’appelle sénatrice et je me suis présentée comme telle et effectivement j’ai des collègues qui veulent et persistent à m’appeler « Madame le sénateur » et je leur dit « Madame la sénatrice », ils disent non non, la sénatrice c’est la femmes du sénateur, alors je leur dis que pour moi il n’ y a pas de problème, vous m’appelez Madame le sénateur mais je vous demande instamment d’appeler mon mari « Monsieur la sénatrice » et là, en règle générale, je ne sais pas pourquoi, ça s’arrête et ils m’appellent « Madame la sénatrice ».  

Eric Kerrouche : Ceci étant, c’est vrai que chez les hommes comme chez les femmes politiques, il y a aussi des représentations genrées de nos rôles respectifs, quand bien même on serait rentré en politique.

Sur la loi, je vais aller très vite. Moi, je veux bien que l’égalité femmes-hommes ait été la grande cause du précédent quinquennat, c’est bon de se le remémorer. Ceci étant, s’agissant des mesures spécifiquement consacrées à la parité, il n’y a rien eu pendant tout le quinquennat. Sur la loi « engagement et proximité » ce n’est pas faute d’avoir porté une multitude d’amendements. En fait, il n’a pas été possible d’aborder le thème de la parité dans ce texte. 

En ce qui nous concerne, on a arraché de mémoire 3 amendements, l’un c’était justement l’alternance femmes-hommes au sein de la liste des adjoints, alternance qui n’était pas obligatoire à l’époque, c’était une de nos propositions. C’est ensuite le fait aussi que quand on a un élu démissionnaire dans une commune de plus de 1 000 habitants, on le remplaçe désormais par un élu de même sexe, et il y avait enfin cette troisième disposition que l’on avait appelé la « représentation miroir », c’est à dire de faire en sorte qu’à défaut de parité à l’intérieur du Conseil communautaire, le nombre de femmes viceprésidentes en pourcentage soit au moins égal au nombre de femmes à l’intérieur du Conseil communautaire.

S’agissant de ce dernier point, si on a réussi à faire passer l’amendement au Sénat, il a été retiré à la CMP (Commission mixte paritaire) au moment de la discussion et, en l’espèce, par l’Assemblée nationale. Cette disposition a été remplacée par une espèce de mesure dilatoire qui disait que, avant fin 2021, il fallait rédiger quelque chose pour faire en sorte que les femmes soient mieux représentées au sein des intercommunalités, ce qui ne s’est pas passé. 

Et comme avant fin 2021 il fallait faire quelque chose, j’ai déposé une proposition de loi qui reprend une partie des thématiques que vous avez développées : le scrutin de liste dès zéro habitant parce que c’est la condition de la parité, l’élection partiaire des adjoints à partir de zéro habitant puisque le mode de scrutin aura changé, la parité miroir au sein de l’exécutif de l’EPCI, l’alternance de sexe mairepremier adjoint, président-vice-président qui semble absolument une nécessité, l’augmentation des pénalités financières pour les partis politiques et puis des dispositions qui devaient être applicables au prochain renouvellement.

On a essayé de glisser l’ensemble de la proposition de loi (PPL) dans des amendements qui concernent la loi « 3DS » : ils ont tous été repoussés au motif que la loi « 3DS » ne concernait pas la parité. C’est ce qu’on appelle chez nous l’article 45, cela a permis en fait que tout l’aspect paritaire sorte du texte, comme cela avait déjà été le cas pour « engagement et proximité ». Alors, il y a bien une PPL du Modem qui avait repris cette parité miroir, sauf que, là aussi la mesure a été enlevée dès la commission des lois. Donc on voit bien qu’il y a une volonté de ne pas avancer en la matière. 

Sur les communes nouvelles, je termine par-là, est ce que c’est une solution en matière de parité ? De mémoire il y a, au 1er janvier 2021, 775 communes nouvelles qui rassemblent à peu près 2508-2510 communes. La commune nouvelle, parce qu’elle est plus grande, pourrait être une solution, mais l’objectif me semble lointain. La vraie difficulté ce n’est pas la loi NOTRe, c’est la fameuse décision du Conseil Constitutionnel pour la commune de Salbris qui fait que la loi NOTRe a dû intégrer cette jurisprudence. La jurisprudence Salbris impose le fait que la représentation des communes se fait essentiellement sur une base démographique, alors qu’avant elle se faisait sur des accords locaux. Je prends un exemple : dans mon ancienne intercommunalité, quelle que soit la commune, on pouvait avoir deux représentants, même les plus petites communes pouvaient avoir deux représentants, et donc il y avait en général un homme et une femme. Ces accords locaux ne sont plus possibles à cause de cette fameuse décision du Conseil constitutionnel sur laquelle il faut revenir, mais cela sous-entend une transformation de la Constitution. Tant que l’on aura cette considération essentiellement démographique, elle se fera au détriment des plus petites communes et au détriment donc des femmes. Sauf que, si vous regardez, en fait, les femmes sont de plus en plus élues dans les petites communes, dans tout le « ventre mou » ce sont des hommes et dans les très grandes communes Paris, Nantes, Marseille avant, Rennes, on peut retrouver des femmes.  Donc ça sous-entend vraiment une transformation parce que sinon on n’ira pas loin, pas plus qu’on ira loin également si on ne transforme pas radicalement le statut de l’élu·e local·e sachant que j’ai écrit un livre là-dessus. Je n’irai pas plus loin, vous pouvez le consulter, y reprendre tous ces éléments. Merci beaucoup.

 Armelle Danet : c’était la fusion des   petites communes qui nous semble importante parce que l’on pourrait arriver à au moins deux représentants, un homme et une femme au sein de l’intercommunalité et là la commune se sentirait moins frustrée, car souvent les petites communes se sentent frustrées ; si elles sont plus grosses elles ont un peu plus de pouvoir au sein de l’intercommunalité.   Qu’est-ce qu’on pourrait faire comme incitation pour pousser les communes à fusionner ; c’est quand même une aberration en France d’avoir encore 35 000 communes alors que dans les autres pays on en est à 8000, 10 000 maximum. 

Eric Kerrouche : Ceci est la carte des communes nouvelles en France. Ce que vous voyez en fait, il n’y en a pas partout, c’est beaucoup dans l’Ouest, très peu dans le l’Est et le Nord, et il s’avère justement que c’est dans l’Est et le Nord de la France que les femmes sont les moins bien représentées à tous les échelons de gouvernement. Au niveau intercommunal, il y a 30 départements où il n’y a pas de présidentes d’EPCI, et c’est essentiellement dans le Nord et l’Est de la France.

Edith Gueugneau : Peut-être simplement parce qu’aujourd’hui c’est selon la volonté des élu·es de pouvoir se regrouper en commune nouvelle, parce qu’il y avait aussi à un moment donné une aide financière qui pouvait permettre d’apporter des projets pour les petites communes. Ce que je constate aujourd’hui c’est que déjà dans des communes comme la nôtre, moins de 5000 habitants, on a du personnel, de l’ingénierie il nous en manque beaucoup, mais dans les petites communes il y a un manque criant de secrétaire de mairie et quand on parle de secrétaire de mairie, vu la complexité aujourd’hui de la gestion des collectivités, il faut trouver la perle rare pour gérer, je crois qu’aujourd’hui il y aurait des mutualisations à envisager. Faut-il voir autrement parce que même si toutes les communes sont hyper tendues avec tout l’administratif et toutes les responsabilités que nous avons, il manque aujourd’hui amèrement de personnel dans les petites communes. Elles ont une secrétaire ou alors une permanence de deux matinées ou deux après-midis par semaine pour le service public, alors bien sûr que nous avons tous répondu pour avoir des « maisons France services » qui servent sur un territoire. Aujourd’hui c’est une vraie problématique d’être maire d’une petite commune sans personnel et donc je pense qu’il y a aussi cet enjeu là qu’on ne voyait pas, il y a 8-10 ans, il y avait encore des secrétaires de mairie et là c’est de plus en plus problématique.

Une intervention de Caroline Antonio (Elles aussi Occitanie):   je suis la déléguée régionale d’Elles aussi pour l’Occitanie et je suis élue dans le Tarn, département très rural. Moi la problématique par rapport aux fusions de communes ce n’est pas compliqué, une commune de 80 habitants et de l’autre côté une commune de 100 habitants, c’est l’étranger, on en est encore là. Quand on arrive dans ce contexte là et que l’on parle de fusions de communes, c’est inaudible. Même si effectivement il y a un seul représentant dans la commune il y a quand même toujours cette lutte de pouvoir qui est très forte, même dans une commune de 80 habitants, et donc on n’arrivera pas à accentuer ces fusions de communes tant qu’on aura ce genre de problématique à la fois chez les habitants, qui y sont quand même pour beaucoup, et chez les élus. Chez les habitants : oui mais moi je ne vais pas là-bas parce qu’attention les querelles de famille on sait même plus pourquoi on s’était brouillé, bref tant que ces sujets-là n’auront pas été évoqués localement ce sera très compliqué d’inciter réellement à la fusion de communes.

Edith Gueugneau : simplement pour compléter, avec les fusions de Communautés de communes qui se sont faites quand même au forceps, on voit le résultat : deux territoires qui n’ont jamais eu l’habitude de travailler ensemble, cela ne sera pas positif pour le territoire. 

Armelle Danet : Je vais peut-être donner un exemple que j’avais entendu, c’était je crois une commune nouvelle en Maine-et-Loire où en fait ce sont cinq communes qui ont fusionné parce qu’elles étaient déjà une Communauté de communes et donc elles avaient l’habitude de travailler ensemble et avant la loi NOTRe elles se sont regroupées, comme ça la commune était plus importante après les fusions d’intercommunalités.

Je m’adresse au législateur, quelles pourraient être les incitations pour pousser les communes à fusionner parce que de toutes les façons elles ont de moins en moins de moyens, donc il faut bien arriver à quelque chose. 

Eric Kerrouche :  Je voudrais revenir sur un point, quand on parle de secrétaires de mairies, je pense qu’il faudrait changer le terme car ce sont des responsables de mairie, ce sont souvent des femmes, et vu le rôle qu’elles remplissent au quotidien, c’est assez technique et c’est de plus en plus technique, je pense que l’on devrait changer le nom.

C’est très compliqué. On est le dernier pays à ne pas avoir adopté en Europe de politique autoritaire de fusion des communes. Ailleurs les communes ont fusionné. Historiquement en France, la loi de 1972 n’a pas du tout fonctionné et donc on a choisi une solution intermédiaire avec les intercommunalités.

Si on ne fusionne que sur des logiques budgétaires, des logiques d’aide pendant un moment donné, on ne peut pas dire que cela soit une très bonne solution et un très bon motif de fusion. Après, il y a vraiment des situations complétement différentes en fonction des strates, 18 776 communes de mémoire ont moins de 1 000 habitants en France sur les quelques 34 900 qui nous restent ; donc c’est énorme. Mais il y a des réalités complètement différentes. On ne peut pas dire qu’une commune de 50 habitants, c’est la même chose qu’une commune de 900 habitants. En dessous de 50 habitants, cela devient compliqué, car on ne délivre plus de services publics. La vraie difficulté, c’est comme vous l’avez dit, en France, on est dans une logique de commune identitaire, alors que dans les autres pays on est sur une logique de commune comme structure qui délivre du service public et les deux ne sont pas forcément compatibles. Je pense que les communes nouvelles, pour les très petites communes c’est une bonne solution, mais il faudra des compensations parce que c’est pas parce qu’on additionne cinq très petites communes qu’elle deviennent une commune riche. Cela sous-entend un encadrement particulier en France, sachant que la péréquation, c’est-à-dire la redistribution aussi bien du haut vers le bas qu’entre niveaux, ne fonctionne plus en France, pour le dire très brutalement, et cela pourrait être une aide pour transformer le fonctionnement, mais cela sous-entend de le poser très tranquillement et c’est assez difficile, sensible, urticant.  

Intervention de Brigitte Perillié (Femmes élues de l’Isère) : la fusion des communes, si j’ai bien compris c’est aussi par rapport à ce qui nous anime ici, c’est à dire la parité de représentation, c’est qu’il y ait plus d’élu·es qui puissent aller à l’interco pour ces communes infiniment trop petites. Il y a une parade à cela, il me semble, c’est que l’on découple la fonction de maire et la fonction de représentant·e de la commune au sein des conseils communautaires. C’est ce que l’on a fait à Grenoble sur l’intercommunalité grenobloise, qui est maintenant une métropole. Mais il y a des communes de 300 habitants voire moins et puis la plus grande, Grenoble, de 150 000 habitants, c’est quand même un puzzle très disparate. Certaines sont en montagne et d’autres sont au creux de la plaine comme la mienne par exemple. Donc en fait ils ont institué, et j’ai discuté la semaine dernière avec une mairesse qui n’est pas conseillère communautaire, c’est son premier adjoint qui y va, je lui ai demandé comment elle suivait les affaires de l’intercommunalité et elle m’a dit qu’il y a la conférence des maires et elle y est, elle y va. Il y a un suivi ensuite de l’ensemble des travaux des commissions et des dossiers, c’est son premier adjoint qui siège et cela ne pose aucun problème. Je suis allé à deux ou trois reprises dernièrement dans cette commune, elle était en visioconférence sur une réunion particulière. Donc il faut arriver à découpler et moi il me semble que si les intercos mettaient en place ces conférences de maires pour que les maires puissent se rencontrer entre eux, échanger, suivre et défendre aussi leur commune au sein de l’intercommunalité et que le Conseil communautaire  dans lequel on a les viceprésidences, ou une autre instance, dans lequel le lien est fait parce que les gens doivent se parler, ça veut dire qu’il y a un couple maire et premier adjoint qui suit les affaires intercommunales, donc pour le coup la boucle est bouclée.  Il se trouve qu’elle c’est la maire, et lui le premier adjoint mais cela aurait pu être l’inverse. Moi j’ai été maire, effectivement au départ cela me semblait important d’être à la Métropole pour suivre les affaires, les dossiers, mais en fait je me suis rendue compte très rapidement que les dossiers on ne les suivaient pas au Conseil communautaire, puisque là ce sont des chambres d’enregistrement (il faut se dire chacun s’écoute parler), et que les dossiers c’était pendant la semaine avec les services et le/la vice-président·e chargé·e de la thématique. Je crois que c’est une question de management et d’organisation du travail de façon à ce que chacun s’y retrouve. Je pense que, quand même, par rapport à cette question de passer encore au forceps  avec des fusions de communes alors qu’on vient déjà de faire des regroupements d’intercommunalités, cela me semble extrêmement précipité et je pense qu’il vaut peut-être mieux brancher les élu.es sur les projets de territoire ; quand vous disiez tout à l’heure que la commune à 10 km  n’a rien à voir avec l’autre, ils sont frères ennemis, si on travaille sur une logique de territoire et non pas de défendre sa commune dans l’intercommunalité, c’est-à-dire on vient représenter et donc on doit récupérer le maximum d’argent pour sa propre commune, et que l’on ait une vision plus collective et plus large, cela changerait les mentalités, les capacités de travail et les résultats. 

Intervention d’Huguette Legros (Femmes e élues de la Manche) : Ce que j’ai remarqué dans ma région normande, ce que nous a montré Mr Kerrouche, c’est qu’en fait, ce que j’ai noté, c’est que les communes qui ont fusionné, c’est parce que les maires étaient aux avant-postes, et qu’ils étaient convaincus. Quand on est maire d’une petite commune de 50-100-200-300-400 habitants, c’est facile de convaincre les administrés qui lui font confiance ; moi je pense qu’il faut fusionner et les fusions, j’en ai connues, ce sont les maires qui sont à l’origine et les plus gros opposants des non-fusions ce sont les maires. 

Edith Gueugneau : Effectivement pour rebondir sur ce que disait mon collègue Kerrouche, c’est qu’en 1973 on a marié des communes et beaucoup ont divorcé après ; parce qu’effectivement quand il n’y a pas un projet qui porte la fusion, la fusion ne tient pas. Maintenant on ne peut plus divorcer avec la nouvelle méthode, mais raison de plus pour réfléchir avant de se marier, et sachant que si l’idée c’est d’être représenté à l’interco il faut se méfier là encore, parce que deux petites communes qui avaient chacune un représentant peuvent se retrouver avec un seul représentant à la fin, donc ça n’est pas une meilleure représentativité au sein de l’interco ; et comme par ailleurs les petites communes sont effectivement plutôt dirigées par des hommes, je ne suis pas sûre que cela aille forcément dans le sens de la parité. Mais lorsqu’il y a un projet, au contraire. Après il faut se dire aussi que, en ruralité là où il y a donc des petits villages, chaque commune a une superficie importante, les deux bourgs sont éloignés l’un de l’autre, ce qui ne facilite pas les communes nouvelles. Le fonctionnement des petites communes repose essentiellement sur du bénévolat, le bénévole d’un village ne va pas forcément devenir le bénévole de l’autre, donc cela dépend vraiment des cas. Lorsque le projet est vraiment autre que financier, objectivement, ça fonctionne tout de suite beaucoup mieux.

Juliette Hurlot (Femmes et élues de la Manche) : Je suis maire d’une petite commune, les habitants ont beau me faire confiance, ils ne veulent pas fusionner ; mais vous parliez d’une secrétaire de mairie, nous avons maintenant une secrétaire à trois, d’ailleurs elle ne s’appelle plus secrétaire de mairie.   Dans ma petite commune J’aurai l’impression que l’on me coupe un doigt si l’on me disait de me marier maintenant. Mais ce que nous avons constaté quand même, c’est que l’Etat, très malin là-dessus, nous pousse, nous appauvrit. Quand les habitants me demandent le service technique de la mairie (240 habitants), le service technique, c’est moi, donc je vais balayer ! Petit à petit vu que les dotations diminuent, celle de Etat , celle du Comité d’agglomération qui est un peu l’équivalent de pôle dans les grandes villes et après celle du pôle de proximité qui était l’ancienne Communauté des Communes, petit à petit ils enlèvent à chaque bout un peu quelque chose, et je n’ai pas l’école, donc un jour je vais me retrouver le bec dans l’eau,  je vais être obligée (de fusionner), ils m’y amènent tout doucement. 

Intervention de Geneviève Couraud : Excusez-moi je ne vais pas parler des fusions de Communes mais je voulais intervenir lors de la Table Ronde précédente et je voudrais aussi parler de la Table Ronde que nous venons d’entendre ; merci beaucoup en tous les cas pour cet après-midi passionnant. Je voudrais remercier les intervenantes de la précédente Table Ronde parce que ça m’a rapporté de nombreuses années en arrière et je voulais dire tout ce que nous devons aux expertes au moment où nous avons mis en place la parité dans les partis politiques. J’étais depuis longtemps déléguée nationale aux droits des femmes au Parti socialiste quand les lois sur la parité sont arrivées et j’ai passé quatre années de ma vie sur des dossiers comme ça et un travail de fourmi à repérer toutes les circonscriptions où étaient les femmes, où étaient les hommes, où est-ce qu’on allait pouvoir pousser des femmes, quelles étaient les circonscriptions favorables, qu’elles étaient celles qui ne l’étaient pas. je sais que dans cette salle certaines s’en souviennent parfaitement bien. Et qui nous a aidé dans ce travail-là et bien ce sont les expertes. Ce sont les expertes au travers des remarques qu’elles faisaient sur le nombre d’hommes, le nombre de femmes députés, pourquoi les hommes cumulaient dans le temps, pourquoi les hommes cumulaient des postes, et c’est toutes ces observations que personnellement moi je dois Armelle Le Bras-Chopard que j’ai entendu avec un immense plaisir tout à l’heure et j’ai été très émue d’entendre aussi Janine Mossuz-Lavau qui avait posé vraiment la bonne question qui m’a permis de débloquer un certain nombre de situations  comme ça,  donc merci les expertes, vous nous avez énormément aidées en interne des partis politiques quand il s’est agi de faire appliquer la loi sur la parité pour les législatives de 2007 et après derrière pour les municipales de 2008, et nous étions extrêmement motivées ça nous a vraiment beaucoup aidées, donc je voulais vous dire un grand merci ici aujourd’hui. La seconde chose sur laquelle je voulais intervenir c’est sur ce qui a été abordé tout à l’heure lors de cette seconde table-ronde et qui est l’axe 3, Madame Lepinay,  de votre rapport du Haut Conseil à l’égalité. J’ai moi-même été membre du Haut Conseil à l’égalité, j’ai été aussi d’ailleurs membre du Conseil économique et social, et membre de la première délégation aux droits des femmes. Je crois même que j’ai fait le premier rapport de la délégation droit des femmes du CESE qui était sur la place des filles et des garçons à l’école, et comme c’était un travail de la délégation aux droits des femmes nous n’avions pas eu le droit d’être imprimées, le rapport est simplement sous forme ronéotypé. Pourtant c’était un très chouette rapport, il était très sympa ce rapport, je vous le recommande vivement. Qu’est-ce que je voulais vous dire sur cet axe 3, qui est de lutter contre les violences sexistes et sexuelles dans le milieu politique, c’est que je suis aujourd’hui ancienne présidente de l’association ECVF (Elu·es contre les violences faites aux femmes) et aussi de l’Assemblée des Femmes. A ECVF nous luttons contre ces violences en interne, ces violences qui touchent les femmes politiques.  Il n’y a pas de mois où nous ne recevons pas des appels de femmes élues qui sont victimes de harcèlement sexuel, de violence dans l’exercice de leur mandat. Il y a 2 jours encore, nous avons été interpellées par une femme élue de Bretagne d’une petite commune, et nous allons travailler avec elle, nous avons la possibilité d’ester en justice, d’interpeller le maire, d’interpeller le préfet et nous allons le faire bien entendu. La situation des élus elle est vraiment difficile ; là je ne sais pas s’il y en a certaines qui se reconnaissent dans ce que je suis en train de dire, mais harcelées chez elles, harcelées au téléphone, harcelées lorsqu’elles accompagnent leurs enfants à l’école, harcelées dans l’exercice de leur mandat, beaucoup d’entre elles renoncent et c’est tout à fait désespérant. ECVF est une association, j’ai signalé tout à l’heure que j’étais socialiste, qui est transpartis politiques, donc c’est tous les partis politiques qui sont concernés par ce fléau qui touche les femmes politiques, jeunes de préférence ; donc vraiment il y a un soutien à avoir et je voulais dire qu’ ECVF c’était vraiment le  mandat que nous nous étions données.  Dire aussi que nous avons été l’association qui a porté cette interdiction d’élire des députés qui auraient été convaincus, qui auraient été condamnés dans le cadre de violence conjugale mais que ce n’est pas à ECVF que l’on doit cette proposition, on la doit à l’AVFT (association européenne contre les violences faites aux femmes) et je sais très exactement quand ça a été prononcé, c’est en 2009 au Sénat, lors d’une  réunion que l’association ECVF avait faite, que nous avions entendu cette proposition.  Et donc je suis très contente que cela paraisse dans votre rapport et comme nous avons une réunion d’ECVF demain, je ne manquerai pas de renvoyer à votre rapport. Merci beaucoup donc.

Intervention d’Anne Gbiorczyk (Famille Rurales/UFCS Ile de France):  Je voudrais passer un message personnel à Madame la sénatrice. Si vous connaissez des bénévoles dans des villages ruraux qui souhaitent s’investir je vous invite à les flécher vers le réseau Familles Rurales dont je vous parlerai volontiers au terme de cette rencontre, un petit clin d’œil.  A été évoqué l’importance du binôme maire-première adjoint, le premier adjoint étant la personne sur laquelle on espère pouvoir s’appuyer avec le DGS si on est empêché, selon la formule. Ce que je voulais dire c’est que la loi n’interdit pas que le premier adjoint d’un homme soit un homme, ce n’est donc pas interdit que la première adjointe d’une femme soit une femme.  

Armelle Danet : C’est cela qu’il faut changer, il faut un binôme paritaire en tête. 

Eric Kerrouche : dans le prochain véhicule juridique, parce qu’il faut être têtu, nous reprendrons la même proposition qu’on va re-déposer, mais encore faudrait-il qu’elle soit acceptée ou par le gouvernement ou par la majorité. Sur la loi « engagement et proximité » et la loi « 3DS », l’ensemble des thèmes paritaires n’ont jamais pu prendre place, c’était étonnant parce que c’était Jacqueline Gourault qui était responsable du deuxième texte. Donc c’est assez surprenant qu’il n’y ai jamais eu une ouverture sur la parité ou que l’on se soit mis d’accord en CMP. Mais là, cela concerne la majorité du Sénat et – en coulisse – le gouvernement, pour retirer par exemple la parité « miroir » qui ne posait aucune difficulté de fonctionnement majeure, pour trouver une solution qui est complètement dilatoire et qui n’est pas effective.

Edith Gueugneau : Je voulais surtout que l’on puisse miser sur l’éducation, l’éducation par rapport aux filles et garçons et investir encore et encore dans l’éducation parce qu’il faut en toile de fond préparer la jeunesse à cette égalité et tout commence dès la petite enfance. Je compte beaucoup sur l’enjeu de l’Education nationale, aujourd’hui il y a quand même beaucoup de problématiques, il y a aussi des problématiques dans les familles, les familles monoparentales, il y a beaucoup de violence, il y a beaucoup de problèmes intrafamiliaux, et aujourd’hui, il faut miser sur l’éducation des enfants, il y a les parents bien évidemment, mais il faut commencer par là. Je voudrais dire en tant que maire de ma commune, on essaie d’avoir des journées, on parle des Journées Internationales, on travaille avec les écoles, on fait des temps forts sur cette égalité, avec l’accueil de loisirs, on essaie aussi, au niveau de notre collectivité, d’être présent sur le sujet ; il faut tout miser sur l’Education nationale, je pense que c’est là un levier, en complément de l’éducation des parents.

 

Remerciements par Danièle Bouchoule, co-présidente d’Elles aussi : Au nom d’Elles aussi je voulais remercier les intervenant.es de la table -ronde, l’assemblée ici présente qui s’intéresse à la parité. Je ne dirai pas, nous en sommes convaincus et cela a été dit au cours des nombreux échanges, tout ce que la parité peut apporter à la démocratie. Dans le réseau Elles aussi nous disons notre espoir et notre engagement pour continuer à avancer de façon déterminée vers la parité, partout, dans toutes les instances,  parce que la parité est un gage de transformation sociétale, nous en sommes convaincues. 

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