Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

Étude qualitative auprès de femmes élues réalisée en 2006

par le réseau Elles aussi
Synthèse réalisée par Marie-Françoise ROY,
Sociologue, ancienne PDG de MFR Stratégies  

 
CHAPITRE 1 : PRÉSENTATION DE L’ÉTUDE 
 
1.1 – Contexte 
 
Le rapport qui suit constitue la synthèse d’une étude réalisée pour le compte de l’association ELLES AUSSI, réseau  indépendant et pluraliste dont le but est d’agir pour la parité à tous les niveaux dans les instances élues. 
Les objectifs assignés à l’étude réalisée étaient d’apprécier comment la loi du 6 juin 2000 « relative à l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives » a été ressentie par les élues, qu’elles en aient bénéficié ou non, dans quelle mesure elle a modifié leurs perceptions et leurs pratiques au sein de la vie politique. Plus largement, il s’agissait aussi de recueillir le point de vue des femmes élues sur la façon dont cette loi a été reçue par l’ensemble des élus et d’analyser de quelle manière elle a éventuellement modifié les attitudes et comportements vis à vis des femmes disposant d’un mandat. 
 
1.2- Conditions de réalisation de l’étude 
 
Afin de répondre aux objectifs de l’étude, 24 interviews en face à face ont été réalisés entre le 20 janvier et le 30 juin 2006 auprès d’un échantillon (voir détails ci-après) varié de femmes élues à différents niveaux dans diverses régions.  
Les interviews ont été effectuées bénévolement par les membres de l’association ELLES AUSSI qui avaient auparavant bénéficié d’une formation à l’entretien. 
Chaque interview a été enregistré, puis retranscrit intégralement afin d’être analysé.   C’est cette analyse qui a permis de rédiger le rapport ci-après.   
 
1-3 – ÉCHANTILLONAGE 
 
ÂGE 
– Moins de 50 ans    7 
– 50-60 ans  11 
– Plus de 60 ans  5 
Non précisé  1 
 
ÉTAT CIVIL 
Mariées  16 
Divorcées   3 
Célibataires  4 
Non précisé  1 
 
ENFANTS 
Ont des enfants 21 
N’ont pas d’enfant   3 
 
PROFESSION (ou profession antérieure) 
Enseignantes  8 
Autres fonctionnaires  4 
Avocate 1 
Ingénieure  1 
Agricultrice 1 
Infirmière libérale   1 
Secrétaire   1 
Commerçante  1 
Médecin  1 
Attachée parlementaire  1 
Cadre supérieure   1 
Non précisé  3 
 
FAMILLE POLITIQUE 
PS   9 
UMP  5 
UDF  4 
PC  2 
Verts  1 
Sans parti  1 
 
FONCTIONS EXERCÉES 
Conseillères générales  9 
Conseillères régionales  9 
Sénatrices   4 
Députées   2 
Maires  2 
Adjointes au maire   5 
 
RÉGION 
Rhône Alpes, PACA  4 
Bretagne, Pays de Loire  5 
Bourgogne   2 
Est  6 
Centre  3 
Martinique   2 
 
1-4- Remarques sur l’échantillon 
 
Nous attirons l’attention sur l’âge relativement élevé de la majorité des interviewées ainsi que sur leur niveau de responsabilités, ces deux caractéristiques étant bien sûr corrélées. Il s’ensuit que l’accent mis sur certains problèmes propres aux élues plus jeunes ou à celles qui accèdent seulement aux fonctions électives sont sans aucun doute minorés, comme étant dépassés et faisant partie du passé. Ainsi en est-il du problème de la garde des enfants, des difficultés d’accès aux fonctions électives. Ceci explique aussi, nous semble-t-il le relatif climat de sérénité qui domine dans la majorité des interviews : nous avons rencontré les gagnantes, pas les vaincues. 
Les interviews des plus jeunes n’apparaissent pas comme un retour sur le passé des plus âgées : les temps ont changé, et ces plus jeunes, contrairement à leurs aînées,  mettent en avant plus volontiers les problèmes liés à leur âge qu’à leur sexe et à leur éducation. 
 
 
CHAPITRE 2 : LES CARACTÉRISTIQUES DES INTERVIEWÉES : 
 
En dehors des caractéristiques « objectives »consignées dans l’échantillon, on remarque des traits souvent communs dans la personnalité ou le parcours de chacune des femmes rencontrées qu’il nous paraît important de signaler et qui éclairent leurs façons de penser et d’agir. 
 
2-1- Beaucoup de militantes de terrain, quelques femmes d’appareil 
 
 Le parcours des femmes élues présente beaucoup de points communs, en particulier un ancrage souvent ancien dans le militantisme, sans autre projet au départ que celui de promouvoir les objectifs de l’association/syndicat qu’elles ont rejoint ou créé, qu’il s’agisse de pratique sportive ou de défense d’une profession . 
 
On note cependant une forte différence entre élues socialistes d’une part, et élues communistes ou de droite d’autre part : 
Pour les socialistes, le plus souvent, l’engagement politique n’est que l’aboutissement de l’engagement citoyen qui demeure la fierté de l’élue : 
  « Pour moi, ce n’est pas un métier d’être élue, c’est un engagement » 
« Déjà en 6 ème, j’étais déléguée de classe » 
« Je fais partie d’une famille qui a toujours eu des engagements, donc pour moi ça      s ‘est fait naturellement. J’ai d’abord lancé l’organisation d’une équipe de basket pour filles » 
« Très tôt dans les jeunesse chrétiennes » 
 
Ce n’est que bien plus tard, souvent une quinzaine d’années après le début de la vie militante, que l’élue adhère à son parti, les responsabilités et la candidature à un mandat électif rendant nécessaire l’appartenance à un groupe politique avec lequel elle entretenait depuis longtemps de bonnes relations mais vis à vis duquel elle souhaitait  parfois garder une certaine autonomie. 
Ces élues valorisent particulièrement le travail de terrain, la proximité, et, ayant gravi les échelons de la carrière, insistent sur les efforts qu’elles font pour maintenir ce qui fait, selon elles, leur force et leur plaisir : le contact, la relation directe au sein de leur commune, de leur région. 
« Les gens me connaissent, on sait que je suis dévouée, j’aime continuer à aller les voir, les recevoir » 
  « Le danger, c’est de se couper de son terrain, on perd la vision concrète, » « Pour moi c’est primordial de garder le contact avec les gens, c’est pas toujours facile, mais j’y tiens » 
 
Pour les autres, l’engagement est d’emblée inscrit dans un cadre politique  
  « La fermeture des mines de Longwy, mes parents étaient communistes déjà » 
 « J’ai commencé en étant adjointe au maire UMP » 
 « Une opportunité s’est présentée il y a déjà 25 ans d’être candidate au Conseil   général » 
 « Mon beau-père avait conseillé le ministre, il m’a introduite » 
 « Un concours de circonstances, ce qui m’a motivé, c’est d’avoir une influence sur la vie de notre société » 
L’appartenance à un parti politique est alors considéré d’emblée comme allant de soi et le développement des responsabilités se fait à l’intérieur du cercle institutionnel du parti. Ces femmes (spécialement les UMP) retracent alors leur carrière en citant les politiciens qui les ont entraînées  et formées dans la course au pouvoir et les ont conduites au mandat électif. Mandat électif qu’elles reconnaissent volontiers souhaiter dès le départ, alors que, pour celles qui viennent de la vie associative militante, le cheminement vers la Politique majuscule est une voie plus sinueuse et parfois tourmentée.   
 
En résumé, 
Le travail militant a souvent précédé le mandat électif et l’engagement politique. Même lorsque celui-ci s’est manifesté d’emblée, le goût pour le terrain, pour les contacts avec la population est affirmé hautement au regard du travail au sein des appareils. Ce goût demeure et certaines élues en ont la nostalgie. 
 
 
2-2- Des femmes d’expérience, mais souvent de jeunes politiciennes. 
 
Conséquence de cet engagement associatif ou syndical le plus souvent préalable, les élues font état de leur manque d’expérience politique lorsqu’elles sont élues à des postes majeurs (ce qui a souvent été le cas à la suite de la loi sur la parité) tels que le Sénat, la députation, ou le Conseil régional. 
Ainsi on fait état, non sans une certaine envie ou admiration, de l’aisance des collègues masculins, de leurs réseaux constitués de longue date ou de la maîtrise de ceux-ci des arcanes des institutions, quand ce n’est pas tout simplement de leur talents d’orateurs chevronnés : 
« L’antériorité, c’est ce qui manque le plus » 
« Tous ces liens tissés depuis 20 ans, maintenant je n’ai aucun complexe mais au début, c’était terrible » 
« Les commissions, je n’osais pas prendre la parole, je n’avais pas le vocabulaire. » « J’arrive, je suis nouvelle, je n’ai pas d’expérience parlementaire, eux ont siégé dans des conseils d’administration, des tas d’organismes, et de ce fait… » 
 
Le parcours, à quelques exceptions près, est celui d’une expérience acquise dans le militantisme (socialistes surtout), puis ou directement dans des fonctions municipales, qui ont permis de prouver sa valeur et de se former aux responsabilités.  
 « Toutes les adhérentes à un parti ont souvent le même parcours, avec un   investissement  associatif qui amène à une candidature pour un mandat électif » 
 
Propos confirmé par les trajectoires de la plupart des intéressées : 
  « C’est une progression lente, de l’association à la municipalité, de la municipalité  au Conseil ou au Sénat. » 
 
Certaines, avec le recul, regrettent de n’être plus très jeunes en atteignant des postes de haute responsabilité et enjoignent la génération suivante à être plus offensive : 
  « On imagine que la politique c’est difficile, mais il suffit d’entreprendre » 
 
Il n’en reste pas moins que la longue « préparation » permise par les responsabilités municipales ou autres a permis aux femmes élues, tout en satisfaisant leur goût du terrain et de l’action concrète, goût revendiqué par toutes de se familiariser avec la politique et de vaincre les dernières résistances, d’imposer cette évidence : si l’on veut agir, au delà du niveau municipal, l’appartenance à un parti qui vous soutient est indispensable : 
« J’ai résisté à prendre ma carte mais si on veut agir… » 
« Je n’ai pris ma carte que tardivement parce que les dissensions me gênaient beaucoup… »  
« Les femmes sont effrayées par la Politique mais c’est la seule possibilité de faire bouger les choses » 
« Comme beaucoup de femmes, je ne suis pas partie en me disant que j’allais faire une carrière politique » 
 
Ce passé a laissé des traces indélébiles, ressenties comme un atout majeur : l’importance du travail de terrain, du travail de proximité, qui fonde les convictions et confère aux femmes leur force d’intervention, ce que résume ainsi une interviewée : 
« Même dans mes rêves, jamais dans ma vie, j’aurais pensé être députée, c’est quelque chose d’extraordinaire ! Je ne suis peut-être pas aussi capable que certains mais j’ai mon expérience de maire, ça me permet de faire honnêtement mon travail , j’y ai tellement appris ! » 
   
2-3- Des femmes «  courtisées » et « choisies » 
 
Lorsqu’elles retracent leur parcours et qu’elles décrivent le moment où elles ont « sauté le pas », l’image de la demande en mariage s’impose, avec son cortège de sentiments de timidité et de fierté mélangées, d’hésitations, de demandes de conseils éclairés, jusqu’au « oui » solennel qui engage définitivement. C’est non sans une certaine fierté amusée, parfois même une certaine coquetterie, que l’on raconte comment un important responsable local est venu vous solliciter : 
« Un jour un ami me dit : tu sais ton nom a  été évoqué pour le Sénat, j’ai cru qu’il plaisantait » 
« Il est venu me voir, il m’a demandé… » 
« On est venu me chercher, de moi-même je n’aurais pas fait le premier pas. » 
« Il a demandé à me voir, j’étais très surprise, je lui ai demandé un délai de réflexion, il m’a rappelé plusieurs fois pendant les trois semaines… » 
« Lorsqu’on m’a fait cette proposition, je dois vous dire que c’est une réflexion que nous avons mené en famille, je leur ai dit que dois-je faire…? Cette sorte de conseil de famille s’est prononcée favorablement. »  
« J’ai été sollicitée et pendant 6 mois, je ne m’en sentais pas capable, j’ai dit non… et puis j’ai un certain nombre d’amis et de collègues qui ont fini par réussir à me convaincre et j’avoue que j’y suis allée la peur au ventre. » 
« Heureusement, mon mari m’a dit ne t’inquiète pas je t’aiderai et puis je me suis dit des fois il faut se jeter à l’eau.» 
« C’est vrai les hommes ils considèrent qu’ils sont aptes .et nous on n’a pas été élevées comme ça. Même si mes parents ont été des gens très en avance, m’ont élevée comme si j’étais un garçon, il y a quand même des habitudes… On hésite. Donc j’ai hésité pas mal, et puis je me suis décidée » 
 
La plupart des élues ont ainsi répondu à une sollicitation, qui leur prouvait qu’elles étaient reconnues, non seulement de leurs pairs, mais aussi d’instances plus élevées auprès desquelles elles ne s’étaient, le plus souvent, pas franchement affirmées. C’est un schéma que l’on retrouve tout au long des interviews : l’action locale, voire mini-locale, qui permet d’acquérir une visibilité et surtout une reconnaissance, une réputation qui s’étend au delà du cercle restreint et va permettre, via une demande et des soutiens « d’en haut » d’accéder à des responsabilités et, même si le mot répugne souvent à un pouvoir élargi. 
 
Quelquefois, la démarche a été plus volontariste : 
« Auparavant, j’avais été le voir et lui avais dit que je me sentais prête pour m’investir 
un peu plus en politique » 
« J’ai fait acte de candidature »  ou même carrément offensive : 
« Je me suis peu à peu pas imposée, mais un petit peu quand même, pour aller sur la liste à l’époque. Et moi ils m’ont dit de rester à la maison, je crois que ça a été le déclencheur, ah vous aviez besoin de moi et maintenant vous n’avez plus besoin, et bien moi je reste ! » 
« Je le faisais de bon cœur jusque là, mais là je me suis dit c’est X qui va être maire moi qui vais faire le boulot, je me suis dit non je n’ai plus envie d’être la servante, de n’être jamais mise en avant. Alors je suis allée le voir… » 
 
Attendue ou pas, ouvertement désirée ou non, c’est au moment où l’on est sollicitée par un parti pour une élection qui va au delà des engagements associatifs ou municipaux que commence, selon les élues, ce qu’elles considèrent comme leur « carrière » politique, même si beaucoup répugnent à utiliser le terme autrement qu’entre guillemets. 
 On notera, non sans satisfaction, que cette frilosité dans l’affirmation de soi et la prise de pouvoir va diminuant : les plus jeunes sont nettement moins timides et, la parité aidant (comme on le verra plus loin) les comportements « modestes » tendent à s’estomper. 
Et, avec le recul, une élue commente : 
« J’ai sans doute été un peu naïve, j’ai attendu que l’on vienne me chercher ; mais, en politique, il ne faut pas faire cela.. et je pense que je me suis un peu fait avoir ! » 
 
En résumé, 
La relative « timidité » des élues explique sans doute en grande partie le fait que leurs parcours soit un si long fleuve : la plupart d’entre elles ont avancé sûrement mais lentement, et à chaque étape en étant soutenue, quand ce n’est pas poussée en avant, par leurs collègues et supérieurs 
 
2-4- Les femmes élues au travail : de grosses bosseuses, un angle d’attaque des problèmes au féminin. 
 
Toutes les élues interviewées se décrivent et décrivent leur consoeurs comme des acharnées du travail, et, si l’on écoute le récit de leur emploi du temps que quelques unes nous détaillent volontiers, on ne peut qu’abonder dans leur sens. 
 
Elles expliquent toutes leur comportement en mettant en avant, outre leur goût du travail bien fait, deux motifs qu’elles répètent à l’envi : 
– leur peur de ne « pas être à la hauteur » 
– le fait que « l’on ne nous pardonne rien » 
Ce qui, chez ces femmes qui en réfèrent volontiers à leur sens aigu des responsabilités, génère souvent un désir de perfection, un souci de ne jamais être prise en défaut. Au delà de ces propos se profile- non sans fierté- l’esquisse d’une façon féminine de remplir sa charge, manière de travailler à laquelle les élues semblent très attachées et qu’elles valorisent volontiers, après quelque temps d’exercice de leurs responsabilités et pouvoirs. 
 
– La peur de ne pas être à la hauteur. 
Souvent, les élues s’étonnent elles mêmes d’en être « arrivées  là, » à ce haut niveau de responsabilités auquel rien ne les avait a priori préparées. Quelques unes regrettent d’ailleurs l’absence totale de formation à leurs nouvelles fonctions. Quelques autres soulignent le soutien qu’elles ont reçu de leur parti ou de leurs collègues. Mais la plupart évoquent leur solitude des débuts et leur manque de savoir et de savoir-faire initial. Bien sûr ceci est renforcé pour celles que la loi sur la parité a projeté à un niveau qu’elles n’avaient jamais envisagé. Elles comparent volontiers leur manques et faiblesses à l’aisance de leurs confrères masculins qui leur paraissent comme maîtrisant les arcanes des institutions dans lesquelles elles se retrouvent projetées sans préparation : ceci pour eux grâce à leur réseau, leurs talents oratoires (qualifié parfois de bagout), et leur expérience du pouvoir. Et puis- la phrase revient souvent-  
« Les hommes ont plus confiance en eux ». 
« Pour eux c’est évident, ça leur revient, ils pensent avoir la légitimité » 
« Eux pensent qu’ils savent faire, parce qu’ils savent diriger »  
« Les hommes sont toujours persuadés qu’eux seuls ont la capacité de gagner » 
 
La seule réponse à ce qu’elles pensent souvent être un état de fait est alors d’acquérir par un travail soutenu les compétences nécessaires, et de justifier ainsi la confiance que l’on a reçue et que l’on acquiert petit à petit dans ses capacités de jugement et d’intervention : 
« Les femmes travaillent plus que les hommes, la femmes a toujours peur de ne pas faire les choses bien, c’est pour ça que les femmes travaillent tant. » 
« Au sénat il y a 17% de femmes, eh bien je constate que la plupart du temps il y a plus de 30% de femmes présentes dans l’assemblée, elles ont peut-être moins de mandats mais c’est aussi qu’elles font les choses plus à fond ».   « Plus exigeantes, elles vont jusqu’au bout. » 
« Les femmes travaillent plus que les hommes, elles préparent plus, ça vient du fait   qu’on est moins assurées, plus inhibées. » 
« Ca a été un énorme boulot pour appréhender les dossiers. » 
 « Au début, je doutais de mes capacités, alors j’étudie à fond mes dossiers…» « Ce qui nous est demandé plus qu’aux hommes, c’est la compétence et le travail, beaucoup de travail.. » 
« Les femmes n’acceptent pas de faire les choses à moitié, de bâcler. » 
« Je culpabilise toujours de ne pas en savoir autant que ceux que j’ai en face de moi, alors je travaille énormément. » 
« On dit elle n’a pas la compétence, ça c’est très difficile à supporter, il faut être irréprochable. » 
« Elles sont plus exigeantes vis à vis d’elles mêmes, elles se disent je n’y arriverai pas.. » 
 
Parfois – ce qui n’arrange rien – s’ajoute la culpabilité familiale : 
« On veut faire beaucoup mieux les choses, parce qu’on culpabilise quand même de laisser les enfants. » 
 
Rapidement, cependant, et le succès aidant, l’on perd ses craintes, surtout semble-t-il face à des collègues masculins dont la supériorité supposée s’émousse au fil du temps et du travail réalisé en commun : 
« Après certains discours qui n’en finissaient pas, eh bien je me suis dit : faut pas faire trop de complexes ! » 
 
– « On ne vous pardonne rien » 
Chacune des élues a des souvenirs de circonstances où ses capacités, son savoir-faire, ont été mis en doute du fait de son sexe. Si les propos mettant en cause la bonne tenue de la maison, la qualité de l’éducation des enfants ou l’absence cruelle de bons petits plats pour le mari relèvent pour la plupart d’un passé qui ne reviendra pas- du moins l’espère-t-on- les élues savent ou croient savoir qu’elles sont obligées à un parcours sans faute :             « Il ne faut pas dire n’importe quoi .parce qu’on ne vous loupe pas. »             « On ne vous rate pas, croyez moi il faut rester très prudente »             « On ne vous fait pas de cadeau, croyez moi ! ».  
« J’ai tenu le coup, mais il faut dire que l’on m’a fait, à moi, des choses qu’on aurait pas osé faire à un homme » 
 
Cet environnement, qui reste « un milieu d’hommes » crée souvent ce qu’une élue dénomme une « confrérie féminine » et beaucoup souligne, parfois non sans étonnement, les connivences ou même les amitiés nées au contact de leur consoeurs d’autres bords. 
« La plupart d’entre nous en ont bavé, ça crée des liens. » 
« Entre parenthèses, j’ai d’excellents rapports avec les femmes, je m’en suis faite des vraies copines  et, c’est hallucinant de le dire, plutôt au parti socialiste et les verts que dans ma propre famille politique. » 
« C’est clair que lorsqu’une femme est distinguée, ça fait plaisir aux autres même si elles ne sont pas de son bord. » 
 
Quelques unes, a contrario, véhiculent l’image bien connue de la jalousie et de la vacherie féminines, mais cela reste minoritaire. 
 
– Une manière féminine de travailler et d’exercer son mandat : pragmatisme, écoute et simplicité 
Une fois dépassées par le travail les craintes de « ne pas être à la hauteur » et, avec le recul de plusieurs années d’exercice de leurs fonctions, les élues amorcent une critique feutrée, mais réelle, de la façon d’être en politique des hommes, et, surtout, exaltent fièrement la façon féminine de travailler en politique : 
« Je vais vous dire un truc : je pense que si l’on était jugées en politique sur sa   compétence, on saurait et on aurait vraiment des femmes, malheureusement ce n’est pas du tout cela. » 
 
Outre leur manque d’assurance initial qui les conduit à compenser par une connaissance approfondie des dossiers (en comparaison aux hommes qui, d’emblée « ont plus confiance en eux »), les femmes élues, à quelques exceptions près considèrent que leur «  absence d’ambition » est une garantie de la qualité de leur travail, en ce qu’elle assure que seulement l’« intérêt général » est recherché. 
  « Je n’ai pas d’ambition, je n’en n’ai jamais eue. » 
Phrase qui revient si souvent que l’on se pose parfois la question de sa sincérité et de sa véracité ! 
 
Plus que le manque d’ambition ou l’affirmation de modestie à laquelle toutes ne se rallient pas, 
 «  Comme je ne suis pas modeste, j’ai le sentiment de bien faire .. »  c’est l’exercice du pouvoir « à la féminine » qu’exaltent les élues :un pouvoir d’où la force ou le rapport de forces frontal est exclu ; dont souplesse et écoute, travail en équipe, proximité et pragmatisme sont les instruments privilégiés : 
 «  La souplesse, c’est un point fort des femmes, elles sont moins formatées; » 
  « J’aime aller à la rencontre des gens, les parlottes, c’est pas mon truc, moi je suis terre à terre. » 
  «  Il y a une autre forme de pouvoir, le pouvoir d’accompagnement, la qualité de l’action, le pouvoir d’influence. » 
 « Je ne dis jamais je, mais nous. » 
 « Ne pas considérer comme un métier d’être élue, mais un engagement. » 
 « La femme est plus dans l’agir, le concret. » 
 « Etre à l’écoute » 
 « Les femmes ont un langage plus vrai, elles sont plus directes, elles vont au fond de ce qu’elles ont à dire et c’est peut-être différent de la manière dont les hommes font de la politique » 
« Ne pas se laisser griser, rester au plus près de la réalité, retourner sur le terrain »  
« On me dit vous êtes conseillère régionale et vous répondez au téléphone, je leur dis ben et alors heureusement que je sais encore téléphoner » 
« On n’a pas compris que je garde le fauteuil de mon prédécesseur, il était un peu usé, mais il est encore très bien ! » 
 
C’est dans leur façon propre d’être que les femmes élues puisent leurs certitudes, leur confiance et leur assurance, et c’est par là qu’elles expliquent aussi le fait que, dans la majorité des cas, les hommes apprécient aujourd’hui leur participation à la vie publique : « Les femmes ne devraient pas douter de leur capacités, elles sont tout à fait capables    par leur originalité, leur façon d’aborder les problèmes, leur travail.  
  « Il faut rester dans notre manière de penser et d’agir. » 
  « Il y a des hommes qui  préfèrent travailler avec nous maintenant » 
Cet exercice de la politique au féminin doit, selon les élues, perdurer coûte que coûte. Après quelques années de travail à un  haut niveau, ce n’est pas toujours facile et le risque de se prendre trop au sérieux est parfois souligné : 
« C’est quand même grisant, on est invitée partout, on vous sollicite »  « Certaines se prennent au jeu.. » 
 
La règle d’or pour ne pas « péter les plombs » est de ne pas oublier d’où l’on vient, de rester soi-même et de préserver sa vie familiale : 
« Mon atout c’est aussi d’être ce que je suis, j’élève 15 poules, je plante des poireaux, j’ai des conversations normales avec des gens avec du vocabulaire normal, je crois qu’il faut que je garde ça. » 
 
Quelques unes, et, semble-t-il beaucoup des jeunes, contestent ce manque de goût pour le « pouvoir » et ne s’embarrassent pas de mots pour affirmer clairement et sans culpabilité aucune leur ambition et le goût du pouvoir, qui n’est alors à leur yeux que le moyen d’atteindre plus aisément les objectifs que l’on s’est fixés. 
 
2-5- Les réactions masculines au parcours des élues 
 
Bien souvent, au cours de leur parcours, les femmes ont eu à essuyer des réactions machistes. Cela vaut surtout pour les débuts dans la carrière, et donc remonte à un temps que l’on espère révolu : 
« Dès l’instant où j’ai été adjointe, beaucoup de gens plaignaient mon mari, comment fait-il pour manger, moi je leur disais est-ce que vous allez demander à Jean si sa femme regrette qu’il ne soit pas là souvent. C’est très désagréable car c‘est très culpabilisant. » 
« Lorsque je faisais ma première campagne, je me souviens d’un monsieur qui m’a dit que je ferais mieux de m’occuper de ma cuisine et de mes enfants, je fais pas mal la cuisine, mes enfants venaient de passer leurs examens avec succès, je le lui ai dit ;  alors il m’a répondu  que si j’y arrivais alors d’accord, il m’apportait son soutien » « Il  me disait : est ce que vous, femme, vous pourrez dégager du temps dans votre emploi du temps, en dehors de votre popote et de votre ménage, et ça de façon méprisante, jamais on ne demande ça à un homme » 
 
Dans l’exercice des fonctions actuelles, les jugements sur les comportements  des collègues masculins sont très partagés. Certaines sont sensibles à ce qu’elles ressentent comme une difficulté à se faire entendre, du fait de leur sexe : 
« C’est vrai qu’il y a quand même une écoute supplémentaire sur ce que va dire un homme »  
« Les réflexions classiques sur les tenues vestimentaires des femmes, on l’entend dans tous les meetings, on ne commente pas les lunettes tordues du vice-président » « Quand une femme monte à la tribune, on commente son tailleur, pas les chaussettes tirebouchonnées du sénateur » 
« En séance, j’ai eu droit à quelques aspects machistes qui me laissent de marbre, je  pense que c’est la meilleure parade » 
« Eux pensent qu’ils savent faire parce qu’ils savent diriger, nous on est soit hystériques, soit anorexiques, c’est un peu difficile » 
 
D’autres, peut-être plus nombreuses, considèrent qu’après un temps d’adaptation, les hommes ont appris à travailler avec des femmes qui refusaient d’être cantonnées aux questions sociales ou familiales et qu’ils y ont trouvé leur compte : 
« Lorsque j’ai été élue au Conseil général, on m’avait mise en garde : ce ne sont que des machos etc.. Je dois reconnaître que mon admission a été formidable, aucune réflexion désagréable, j’ai été bien aidée, avec beaucoup de gentillesse » « Nous les femmes on est faites pour s’entendre avec les hommes, moi j’ai une complicité avec les hommes, ça se passe très bien » 
«  Au Sénat, finalement ils ont été très contents, on apporte un regard nouveau, du changement » 
« Les jeunes hommes travaillent plus facilement avec les femmes que les vieux routards, ils n’ont pas reçu la même éducation » 
 
 Ce dernier propos est démenti par une autre élue qui dénonce «  l’agressivité » des jeunes politiciens qui ressentent la montée des femmes comme un obstacle supplémentaire à leur avancement dans la carrière politique. 
Au final, les propos sexistes ne sont pas l’apanage des hommes : 
« J’ai beaucoup souffert pendant la campagne législative, beaucoup de femmes m’ont attaquée sur le fait que je devrais être à la maison à m’occuper de mon mari malade, beaucoup m’ont dit à l’issue d’une journée épuisante qu’on ne savait pas que les femmes d’aujourd’hui ne ciraient pas leurs chaussures.. » 
 
En résumé, 
La plupart des élues ont eu à surmonter des quolibets et remarques machistes, mais l’exercice des fonctions électives témoigne d’expériences contrastées qui ne sont pas forcément négatives. 
 
2-6-Femmes élues et famille 
 
La famille est un thème qui revient souvent dans les interviews et qui est très cher aux élues: à la fois car c’est un thème sur lequel on les a attaquées et sur lequel on les attaque encore parfois ; mais aussi parce que celle-ci peut être un problème par rapport à l’exercice des responsabilités, alors même que la famille est très souvent considérée par les élues comme une source indispensable de leur équilibre et, partant, de leur réussite dans leur mandat. 
 
• Poids de la famille d’origine 
Presque toutes les élues évoquent leur famille d’origine comme étant au cœur de leur engagement (cf. supra). Ainsi l’on en appelle aux figures tutélaires du grand-père, du père, de l’oncle qui exerçait un mandat local souvent modeste ou quelquefois prestigieux. L’empreinte des pères est d’avoir souvent permis de se familiariser avec la vie communale ou associative :  « Mon père, mon grand-père, je les ai toujours vu à la mairie, au conseil municipal » 
 
Alors que les mères ont surtout joué un rôle dans la transmission des valeurs morales qui demeurent au cœur de l’action : altruisme, générosité, justice sociale, souci du bien commun. 
« Je pense que mes parents m’ont transmis le goût de la vie politique, ils avaient en eux une forme de générosité.. » 
« Si je réfléchis aux personnes qui ont jalonné ma vie et apporté une aide pour aboutir à ce que je suis, clairement il y a mes parents avec leur ouverture sur la société » 
 
On est le plus souvent reconnaissante d’avoir reçu une éducation qui mettait les filles à l’égal des garçons, pour une génération où ce n’était pas nécessairement l’évidence. 
Seule une femme issue de l’émigration explique son parcours politique par la révolte et la rupture vis à vis du milieu familial : 
« J’ai dû, à un moment donné me séparer de ma famille, me mettre en rupture par rapport à ces valeurs qui font que les femmes étaient plus ou moins considérées comme des sous-êtres. » 
 
• Le conjoint 
Rien n’aurait été possible sans lui. Souvent il a « poussé » sa femme, lui a donné confiance, a accepté de bon cœur le changement de rythme et les horaires difficiles. Lorsque lui-même exerce des fonctions politiques, c’est un grand facilitateur, voire un formateur, une introduction précieuse aussi bien aux appareils de partis qu’aux mécanismes organisationnels des institutions. S’il demeure étranger au milieu politique, le mari/compagnon est alors valorisé comme élément d’équilibre par rapport aux soucis quotidiens. 
« C’est un choix qui se fait à deux, Quand les enfants étaient jeunes, mon mari était relativement disponible parce qu’il fallait bien assurer les réunions le soir.. »   « Je ne survivrai pas si je n’avais pas mon mari. » 
 
Le mari a souvent joué un rôle facilitateur en assurant l’essentiel des revenus du foyer à un moment où l’intéressée choisit d’abandonner sa profession (ou tout espoir de promotion) lorsqu’elle se décide de se consacrer entièrement à la vie politique et avant que ses efforts soient couronnés de succès : 
« J’avais renoncé à ma vie professionnelle, mais je l’avais fait parce que mon mari avait un salaire sûr, c’était un choix qu’on avait fait, il avait accepté cela » 
 
Une autre façon de soutenir l’épouse élue, c’est le partage des tâches traditionnelles que certains acceptent avec bonne humeur. Pas tous ! 
« Mes engagements, je les toujours pris avec l’accord de mon mari même si des fois il le regrette. Toutes les tâches ménagères m’incombent car, étant un homme du sud, il n’y touche pas » 
 
Quelques cas moins optimistes sont rapportés (on mentionne un divorce d’une collègue, et quelques grognes ci et là) mais c’est loin d’être la règle. Par contre, plus souvent, les  célibataires considèrent qu’elles n’auraient pas pu ou su s’engager comme elles l’ont fait si elles avaient eu un conjoint ou un compagnon.  
« Sans mari, sans enfant, mais avec un compagnon, c’est peut-être plus facile de faire de la politique » 
« Il faut une disponibilité permanente, ce qui est plus difficile pour les femmes qui ont une famille » 
           « Si j’avais un mari et des enfants, je ne sais pas où je les placerai » 
 
 
• Les enfants 
Ils restent le problème à résoudre lorsque l’on s’engage en politique, et ce qui explique pour beaucoup leur engagement, ou du moins leur « décollage » tardif : 
« Une femme ne peut pas laisser sa vie de famille, elle ne peut pas laisser ses enfants de côté, c’est viscéral chez la femme, ou alors il faut que les enfants soient élevés » «  Quand on parle avec les jeunes femmes, il y a le problème de la garde des enfants, c’est un frein pour les jeunes  femmes » 
«  Le couple c’est parfois un frein, mais pas le plus grand, car le plus grand c’est la garde des enfants » 
«  Avec les réunions à des heures impossibles, la vie d’élue est incompatible avec une vie familiale avec jeunes enfants » 
 
Ce problème de garde semble d’autant plus crucial que l’on est « jeune » en politique, c’est à dire élue municipale : le problème des indemnités pour garde est posé et les élues chevronnées qui en ont bénéficié à leurs débuts sont très reconnaissantes qu’une telle décision ait été alors votée. 
Plus tard, la question se pose moins : les enfants ont grandi et, avec les fonctions de plus haute responsabilité, les revenus se sont accrus. 
 
Ce qui demeure, c’est le souci de l’équilibre familial, l’équilibre de l’élue comme celui de la maisonnée, l’un n’allant pas sans l’autre. Les interviewées insistent beaucoup sur leur désir de faire participer la famille, en particulier les grands enfants à leur vie, leurs décisions : « J’ai associé toute la famille, le revers de la médaille quand on a perdu, les enfants ont pleuré » 
« J’ai toujours amené ma famille avec moi, mon rôle d’adjointe, c’était en famille, on allait aux concerts, au théâtre, aux expositions » 
« Pour les régionales, pour les sénatoriales encore plus, la décision a été prise en famille, j’ai demandé l’avis de mon mari, l’avis des garçons » 
 
Dans ce souci d’ « associer » son petit monde, il y a comme un vague soupçon, un reste de culpabilité, ce qu’une élue exprime parfaitement : 
«  Il faut quand même une sacrée santé, on culpabilise quand même de laisser ses enfants, donc on veut faire beaucoup mieux les choses, tu veux être à la fois mère, épouse, tu mènes tout de front alors que les hommes…, C’est peut-être notre tort » 
 
Une femme conclut par la nécessité de trouver un équilibre: 
« Mes filles n’ont vécu que dans la politique, quand elles étaient petites j’avais la chance d’avoir maman, aujourd’hui elles sont plus grandes, c’est pas pour autant qu’elles n’ont pas besoin de ma présence, j’essaie par un savant équilibre d’accorder un minimum de temps de présence, dans l’ensemble ça se passe assez bien, en faisant beaucoup d’efforts, je pense que je ne suis pas la seule » 
 
En résumé, 
La famille est un vecteur de problèmes -essentiellement les enfants pour les jeunes élues- mais aussi un élément fondamental d’équilibre, une sort d’antidote au stress de la vie en politique : 
«  J’ai besoin de ma famille pour pouvoir me restituer, pour ne pas vivre dans ce cercle fermé que peut être la politique.. » 
 
 
CHAPITRE 3 : LA LOI SUR LA PARITÉ 
 
3-1- Les jugements sur la loi 
 
Les opinions émises sur la loi sur la parité font le plus souvent état d’une évolution entre les jugements a priori, avant le vote de cette loi, et les attitudes d’aujourd’hui, au regard de ce que l’on peut observer de ses effets sur la vie politique. 
 
• Une loi diversement accueillie à l’origine. 
Peu d’élues témoignent d’un enthousiasme initial pour la loi, même si la plupart reconnaissaient sa nécessité. A des propos comme ceux-ci : 
« La loi de 2000, j’ai été très contente qu’elle soit votée car ça fait des années pour ne pas dire des décennies que je me bats pour que cette parité soit reconnue » 
« Moi je trouvais que c’était absolument indispensable » 
S’opposent plus souvent des attitudes de départ réservées ou ambivalentes : 
« Au départ, j’étais contre les quotas » 
« Quand la loi sur la parité a émergé, j’y étais très opposée, j’étais sur la position d’Elisabeth Badinter. Je n’aime pas ce qui est discrimination positive » 
« J’ai soutenu la loi mais sans y croire » 
« Au moment où la loi a été votée, je n’y étais pas favorable pour la raison très simple que je considérais qu’elle avait un aspect un peu péjoratif pour les femmes » « L’idée de quota rabaisse les femmes » 
« Voir que nous femmes nous avons besoin d’une discrimination positive, c’est vexant quelque part et humiliant » 
 « Elle n était pas évidente cette loi, c’était quand même le constat d’un échec » 
« J’en ai profité, je n’aurais jamais été élue sans, mais j’étais pas pour » 
 
 
• Une loi aujourd’hui reconnue comme très positive. 
Avec le recul, toutes les interviewées s’accordent à reconnaître les bienfaits de cette loi : elle a changé les mentalités, elle a amélioré le monde politique, elle a été un formidable ascenseur du genre féminin. 
  « un immense saut en avant » 
« un fait acquis » 
« a fait franchir un pas important » 
  « a eu des effets bénéfiques » 
 
• Une loi qui pose cependant quelques problèmes. 
Que ce soit dans les restrictions qui la limitent ou dans sa mise en œuvre qui n’est pas exempte d’effets pervers, comme nous le verrons ci-après. 
 
 
3-2- L’expérience personnelle de la loi. 
 
• Une promotion sociale, un changement de statut. 
Pour beaucoup des élues, la loi sur la parité a été l’occasion d’une  « promotion » impensable auparavant, d’un saut considérable dans la hiérarchie des responsabilités politiques, ce qui explique en partie le manque d’assurance initial que certaines décrivent en détail. Il leur a fallu parler devant un public inhabituel, se documenter sur des questions jusque là inconnues, et même parfois changer de style vestimentaire pour s’adapter au nouveau contexte. A ces changements s’ajoute souvent  une augmentation sensible des revenus. Changement majeur que ces femmes qui se disent dépourvues d’ambition et ne vivent pas toujours dans la sérénité, craignant de ne pas être « à la hauteur » ou regrettant parfois leur univers local bien balisé. La satisfaction majeure  initiale semble surtout être celle d’avoir relevé le gant, d’avoir surmonté le défi et gagné le challenge. 
 
• Un changement de l’environnement professionnel. 
Pour les élues de longue date, la loi sur la parité a permis d’observer les changements que la brusque augmentation du nombre de femmes dans les Conseils généraux, régionaux ou au Sénat a provoqué. Le plus évident est la couleur qui s’installe dans les rangs, condamnés jusque là à la couleur grise ! 
«  Elles peuvent arriver en jeans et blazer, elles apprennent ainsi aux hommes la simplicité ; Les femmes ne doivent pas entrer dans la logique du décorum » 
Ce constat, que l’on peut juger bien frivole est en fait symptomatique et symbolique d’un apport de vie, d’un souffle d’air frais, d’une ouverture, d’un élargissement des perspectives. 
«  Elles apportent un regard différent et on en voit déjà des résultats » 
« Que les deux composante s de la société puissent s’exprimer, que les femmes puissent s’exprimer, c’est apporter un regard complémentaire, prendre des dispositions complémentaires » 
En même temps que leurs couleurs, les femmes apportent aux instances dont elles étaient trop largement absentes, le point de vue de l’autre moitié du monde qui faisait cruel défaut jusqu’alors. 
« Nos collègues sénateurs sont très contents de nous avoir, ils affirment que cela a changé l’ambiance, ils nous écoutent lorsqu’on prend la parole, ils nous respectent » 
 
Leur façon de travailler, plus souple, concrète, est appréciée de leurs consoeurs plus anciennes dans la fonction, en ce qu’elle les aide à promouvoir un style que l’écrasante majorité masculine tendait à ignorer ou méconnaître. Au delà, les anciennes remarquent que leurs collègues masculins, après une éventuelle grogne passagère, ont souvent finalement tendance à apprécier ces regards nouveaux, cette logique originale. 
 
« La pluralité fait la richesse. On va mieux répondre aux besoins des populations parce que chacun de nous, homme et femme va apporter une question, c’est assez simple et cela tient à cette représentation qui pour le moment n’est pas assez bien proportionnée » 
« Je constate avec surprise et plaisir qu’un certain nombre d’hommes se pose enfin la question de la place des femmes dans la politique. Maintenant ils ont récupéré des femmes, quelquefois contre leur gré, ils s’aperçoivent qu’elles sont efficaces, qu’elles apportent à notre société autre chose et beaucoup d’entre eux se disent favorables à une présence des femmes » 
« Les exécutifs, c’est là où l’on verra progressivement qu’il y a « une manière d’être des femmes », qui est intéressante pour juger des problèmes que l’on traite » 
« Les maires hommes le confirment que c’est très intéressant de travailler avec les femmes » 
 
La « simplicité » des femmes, moins convenues dans leurs analyses, moins « ronflantes » dans leurs discours, parfois décontractées dans leur habillement tend à « ringardiser » (c ‘est leur terme) une approche solennelle, docte, qui faisait trop souvent partie de la panoplie du parfait politicien. 
 
Bref, les anciennes mesurent les effets de cet apport de sang nouveau : renouvellement des points de vue, rajeunissement des mentalités moins coupées de la société civile, « équilibre » d’un petit monde qui avait tendance à vivre et à penser en vase clos. 
 
Quelques couacs cependant dans ce concert de louanges 
 
• L’inexpérience. 
Certaines habituées de longue date des tribunes officielles de la République regrettent que la loi sur la parité ait propulsé à des fonctions élevées des femmes qui n’étaient pas ou mal préparées pour les dites fonctions. Au mieux, on critique les partis qui n’ont pas /pu /su former leur cadres qui sont arrivées mal préparées, ce dont, nous l’avons vu, les intéressées témoignent volontiers. 
« La parité pose des difficultés. La femme arrive parfois sans formation en politique » « Certaines n’avaient aucune expérience locale, c’est un peu déconcertant, il faudrait des personnes plus affrontées aux vrais problèmes, ça m’a un peu frappé ça » 
 
Même si, selon elles, les choses se sont largement améliorées depuis 2000, certaines ont été gênées par ce qu’elles qualifient d’incompétence et qui nuit, à leurs yeux, à l’image des femmes en politique pouvant générer ou alimenter, selon elles, des réactions moqueuses ou agacées de la part de leurs collègues masculins. 
 
Plus grave est la dénonciation de ce que plusieurs nomment « les femmes potiches » ou « alibi », propulsées par les appareils, et qui sont loin d’avoir le « feu sacré », plus soucieuses de plaire ou de représenter leur mentor que d’affirmer leurs convictions et leur détermination : 
« On n ‘a pas toujours laissé la place aux femmes qui en voulaient, on va chercher des femmes qui veulent bien, elles feraient tout ce qu’on veut, elles feraient du patronage de la même façon » 
« Il y en a, elles ont des tas de qualités mais elles ont été là par hasard, la situation, il fallait la parité » 
 
 Il y a parfois comme un sentiment d’amertume et d’injustice, quand s’impose la comparaison entre les durs combats qu’elles ont dû mener et ce qu’elles estiment être la facilité qui en ont conduit d’autres là où elles sont, sans grands efforts à leurs yeux. 
 
« Vous savez, c’est comme toutes les évolutions sociales pour les femmes, elles se sont battues, sont très contentes quand ça arrive puis deux ans après celles qui découvrent ça trouvent que c’est naturel.. » 
« Il ne faudrait pas que les femmes soient en politique des femmes alibi, des femmes qui sont là parce qu’il faut des femmes » 
« Les femmes qui se sont imposées un parcours difficile, elles sont totalement  légitimes, mais il y en a d’autres … » 
« Des plus âgées nous ont dit, nous on a dû s’imposer, et à nous on a donné cette opportunité sans rien avoir à prouver » 
« Je considère que ce que j’ai acquis, c’était avant tout un bastion masculin, instinctivement je suis fière d’être devenue sénateur dans ce bastion masculin » 
 
D’où sans doute le propos émis à quelques reprises, selon lequel elles comprennent le sentiment de jeunes politiciens mâles qui voient leur carrière bloquée par cet afflux brusque de femmes dans les instances. 
 
« Comment aller expliquer à un homme qui n’a pas démérité, qui a rempli son mandat avec tout le travail qu’il a pu faire qu’il faut absolument qu’il laisse la place à une femme parce qu’il faut des femmes » 
« On sacrifie des jeunes » 
« Je fais partie d’une génération ou la parité fait partie des acquis, mais je vois aussi le malheur des jeunes hommes qui disent qu’ils n’y aura plus d’espace pour eux en politique, parce que les places qu’on libère, c’est pour les femmes et ça, c’est pas bien non plus » 
 
Quoi qu’il en soit, la loi reste une « bonne loi » et encore plus une loi qui doit être améliorée. 
 
3-3- Les effets de la loi sur la société globale 
 
Selon les élues, la société globale semble moins en retard sur la question des femmes que le monde politique ; la loi aurait donc eu un effet de « mise à niveau », d’alignement du microcosme sur la société. 
« On avance, dans les couples, les garçons prennent plus facilement part aux travaux ménagers, les jeunes filles ne sont plus prêtes à accepter ce qu’ont accepté leurs mères. » 
« L’opinion, elle n’est pas pour un homme ou une femme, elle s’en fout, la question se fait sur la capacité et les compétences » 
« Soyons clairs les partis sont machistes mais je crois que les sondages et la population dépasseront la volonté des partis » 
 
Plus largement, la loi sur la parité fait partie de la lutte pour la démocratie : 
« Le combat pour la libération des femmes est pour moi partie intégrante du combat pour la dignité de l’homme, du combat pour la démocratie, cela en est vraiment constitutif » 
 
L’effet majeur que l’on attend de la loi sur la parité auprès des femmes est de les décomplexer par rapport au politique et de générer des vocations, trop peu nombreuses aujourd’hui : « Je crois que c’est un trait caractéristique encore des femmes, qu’elles ne se sentent pas aptes, pas capables, elles ont peur des responsabilités » 
« Il manque encore trop souvent la volonté d’y arriver »  
« Nos filles sont compétentes, exactement comme nos fils, mais souvent elles s’en foutent de leurs carrières » 
« La loi a mis en route un certain nombre de femmes, le vivier a grossi. Ce qui importe c’est d’avoir des femmes qui ont envie d’y aller » « J’espère que cette loi va susciter des vocations » 
 
3-4- Les améliorations de la loi sur la parité  
 
– Une minorité, compte- tenu de ce que l’on vient de voir aurait apprécié une mise en œuvre plus progressive de la loi (30%, puis 40%, pour aboutir à 50%) : moins d’impréparation aux fonctions, jeunes politiciens mâles moins bloqués dans leur carrière. 
– La grande majorité souhaite vivement l’extension de la loi : communes de moins de 3 500h, députation, et système plus contraignant pour que les candidates aient autant de chances d’être élues que les hommes ( fin des magouilles des partis pour contourner la loi tout en la « respectant ») 
– Une interviewée suggère que les amendes des partis défaillants soient augmentées et remises aux associations féminines /féministes. 
 
3-5- Le cumul des mandats 
 
La question du cumul des mandats a été abordée dans le cadre des problèmes que pose l’application de la loi sur la parité. 
Mis à part quelques grosses cumulardes de longue date, qui se savent critiquées, mais « prêtes à s’en expliquer », la plupart des élues perçoivent la limitation- aussi bien du nombre que de la répétition- des mandats comme la solution qui faciliterait l’accès du sang neuf dans les instances représentatives. 
« Je suis contre le cumul, cela règlerait le problème des jeunes qui arrivent si c’était plus ouvert »  
« La suppression du cumul permettrait d’avoir un éventail d’âges beaucoup plus 
grand, d’ouvrir à plus de personnes » 
« Il ne faut pas que les gens restent en place, ça bloque l’arrivée des jeunes espoirs, c’est important de laisser la place aux jeunes » 
« Là on se prive de la génération des 35/45 ans qui ont aussi des choses à dire » 
 
On remarque que cette question du cumul est évoquée plus pour les classes d’âges « défavorisées », à savoir les jeunes, que pour les femmes : la porte est désormais ouverte à ces dernières. 
On remarque aussi que, plus les élues sont « confirmées » dans l’exercice de la politique, plus leur propos sur le cumul des mandats se fait plus nuancé : elles « démontrent » à quel point l’équilibre et l’efficacité naissent d’un mandat local renforcé par un mandat national (le « maillage »), elles exaltent les compétences qui ne peuvent s’acquérir qu’avec le temps… Raison sans doute pour laquelle une élue émet la crainte qu’une fois dans la place, les femmes n’agissent pas autrement que leurs collègues masculins : 
« Ca me gênerait que les femmes s’activent à cumuler » Sauf une ou deux jeunes, radicales : 
  « Moi je dis une personne, un mandat, et que ça ne s’éternise pas ! » 
 
La plupart fixent les limites à deux mandats, et à deux élections successives, quitte ensuite à « tourner » (changer de mandat).Mais sans « s’accrocher », ce qu’actuellement peu savent faire : 
  « Force est de constater que très peu ont la sagesse de s’arrêter à temps ! » 
 
 
3-6- Le statut de l’élu 
 
C’est une question qui n’a été évoquée que par une minorité d’interviewées, plutôt dans le cadre de la qualité démocratique de la représentativité des élus, que spécifiquement pour les femmes. 
 
C’est aussi une question étroitement liée à celle du cumul des mandats en ce que la rémunération « décente » n’a de sens que si elle permet de vivre à ceux et celles qui ont décidé de faire carrière en politique. Si le cumul des mandats et donc celui des rémunérations perdurait, cela conduirait  inéluctablement à l’enrichissement parfois constaté et largement dénoncé. 
L’on souhaiterait surtout que le statut (= rémunération) « ouvre » la politique à d’autres sphères que celle des fonctionnaires, qui constituent aujourd’hui- et l’échantillon en témoigne- le plus clair des corps des différentes instances. 
Ceci étant, les élues qui ne viennent pas de la fonction publique sont unanimes pour avancer les limites du statut : 
 
« Le problème du statut de l’élue c’est plutôt celui de son réemploi, sinon moi je trouve que l’on gagne suffisamment » 
« Est ce que je pourrai retrouver un travail ? » 
 
S’il est un point sur lequel toutes s’accordent, c’est le dur passage de la vie de salariée à celle d’élue : un moment où les indemnités sont trop faibles, pour ne pas dire inexistantes, où le choix d’un travail à mi-temps ou tiers de temps se révèle le plus souvent décevant : perte d’intérêt du travail (moins de responsabilités), sentiment de ne pouvoir se consacrer autant qu’on le souhaiterait à ses nouvelles fonctions. 
« A trente pour cent, on n’a pas d’épanouissement professionnel » 
 
Un autre point sur lequel toutes s’accordent en évoquant ces débuts difficiles, souvent au conseil municipal : la non généralisation des indemnités pour garde d’enfants lors des séances le plus souvent nocturnes. Ce qui fait dire à nouveau que l’on ne peut se lancer dans cette voie lorsque l’on a de jeunes enfants. 
« C’est pour cela qu’il n’y a pas de jeunes en politique » 
 
La grande majorité des interviewées qui évoquent ce statut de l’élu, en en mesurant la complexité, pensent que la question ne sera pas résolue de sitôt. Ce qui n’empêche pas l’une d’entre elles d’en avoir fait son « dada ». 
« Cela a été mon dada de campagne, j’ai toujours milité pour le statut de l’élu. C’est à dire non cumul systématique, réflexion sur le financement, sur le fait que l’on puisse revenir vers une profession quand elle n’est pas apparentée à la fonction publique. C’est important » 
 
 
En résumé 
 
La loi sur la parité a eu quelques ardentes promotrices, elle a surtout généré beaucoup de réserves au départ, avant ou juste après son vote, au nom d’une discrimination positive qui n’a pas très bonne presse dans l’ensemble, et au nom de la fierté féminine un peu écorchée par ce dispositif.  
Mais toutes les élues interviewées reconnaissent aujourd’hui que cette loi était non seulement utile, mais indispensable, qu’elle a permis de franchir un saut dans le temps et les mentalités (surtout celles, plutôt ringardes du microcosme politique volontiers machiste) et qu’elle a donné une chance inespérée aux femmes de participer à la société en les propulsant au cœur des instances de la République. 
Lesquelles femmes, grâce à un travail acharné, ont vite comblé le manque d’expérience ou même de compétences pour des fonctions auxquelles elles n’avaient parfois même pas songé. 
Les plus anciennes dans ces fonctions importantes regrettent parfois le manque de préparation de leurs consoeurs ou, plus gênant, le manque de motivation. Surtout elles constatent des effets regrettables sur la jeunesse masculine qui voit encore s’éloigner le moment où ses talents seront reconnus et pourront s’exercer. Ainsi le nouvel handicap qui apparaît est l’âge après avoir été le sexe. Ce qu’une jeune élue résume bien :  « Mon problème, ça n’a pas été mon sexe, bien au contraire, ça a été mon âge » Ce handicap est encore renforcé par le cumul des mandats qui nécessiterait d’être rigoureusement limité.  
Il n’en reste pas moins que le souhait est unanime de voir les contraintes de la loi s’exercer maintenant à la députation et aux petites communes, pour parfaire le dispositif. 
 
 
 
 
CHAPITRE 4 : DES SOUHAITS ET DES RECOMMANDATIONS POUR LES JEUNES GÉNÉRATIONS 
 
 
En matière de synthèse, nous aimerions nous faire la porte parole des élues, lorsqu’elles parlent de l’avenir des femmes en politique. 
 
• L’évolution du statut des femmes renvoie leur histoire à l’Histoire.  Les élues, surtout celles qui n’ont pas attendu la loi sur la parité pour avoir des fonctions électives importantes, considèrent qu’elles ont « ramé » et ouvert, grâce à leur combat et à leur détermination, la voie à un avenir plus juste, sinon radieux : « Nous sommes de la génération chair à pâtée » Ce que la plus jeune d’entre elles reconnaît volontiers : 
« Je remercie toutes les femmes qui se sont battues parce qu’aujourd’hui j’en suis héritière » 
 
Toutes les interviewées s’accordent à dire qu’un pas a été franchi et qu’un retour en arrière ne peut être envisagé : la page est tournée. 
 
• Une longue route en perspective. 
Texte de loi, combats militants ne sont que la brèche par laquelle les femmes peuvent désormais participer plus facilement à la vie publique. Pour autant, rien n’est gagné si les femmes ne montrent pas plus d’enthousiasme pour le chemin qu’on leur indique. Tel est le point de vue de nombreuses élues, qui analysent ainsi le manque des vocations : 
 D’abord le manque d’intérêt ou de goût pour la politique. Les élues profitent alors de leur interview pour en faire une tribune et plaident pour une carrière qui les épanouit, les a rendues heureuses :  
« Quand on est élue, on vit une expérience merveilleuse » 
« C’est formidable, il faut y aller » 
« Passionnant, vraiment passionnant ce métier que j’ai appris » 
« Si je voulais conclure, ce serait un appel vraiment profond à l’engagement politique, » 
Comme nous l’avons vu plus haut, certaines se désolent ou craignent que les femmes se mettent elles-mêmes à l’écart, manquant de courage, d’ambition et- surtout de confiance en elles. Ah, cette confiance, comme on aimerait la transmettre ! 
« Il faut rassurer les femmes qui veulent s’engager en politique, on ne demande pas une expertise dans tous les domaines » 
« Il ne faut pas avoir peur, on a des ressources, on est toutes capables » 
« Il faut vraiment que nous donnions aux femmes le sentiment de leurs compétences, de leurs capacités et puis il faut qu’elles osent, le grand mot, c’est OSEZ ! »  
« Venez participer à la vie politique parce que vous n’êtes ni plus bêtes, ni plus intelligentes que les autres, mais venez travailler parce qu’à partir du moment où l’on est debout et qu’on sait un peu réfléchir, qu’on aime un tant soit peu les gens, eh bien c’est formidable, on peut y aller » 
 
Ce « faites comme moi » se nuance lorsqu’il est question du calendrier personnel : la plupart regrettent de ne pas avoir commencé plus tôt, d’avoir tergiversé avant de prendre la carte de leur parti, d’avoir attendu trop longtemps qu’on vienne les chercher quand ce n’est pas les supplier. Bref l’on souhaite que leur expérience permette aux jeunes générations d’emprunter des raccourcis, d’aller plus vite et de partir plus tôt. On en appelle aux cours de civisme dès l’école, à la participation à la vie municipale dès que l’on se fixe dans la vie, à une politique de formation des partis et, last but non least, à la prise en compte par ceux-ci de ce que la majorité des élues considèrent comme l’obstacle majeur des jeunes femmes : le problème de l’éducation et de la garde des enfants que les responsabilités politiques rendent particulièrement difficiles.  
 
Ce vibrant appel n’est somme toute qu’un appel à un surcroît de démocratie : 
 
« On a besoin des femmes pour avoir un discours et des actes plus équilibrés sur la vie sociale » 
Partager l'article :
Facebook
Twitter
LinkedIn
Pinterest