Zuzana Caputova

Zuzana Caputova, co-fondatrice du jeune parti Slovaquie progressiste a été élue, ce 30 mars 2019, présidente de la Slovaquie. Première femme occupant cette fonction, elle a triomphé au second tour, avec 58% des voix, du candidat du parti populiste de gauche actuellement au pouvoir. La cohabitation s’annonce difficile, mais certains voient dans cette élection un espoir pour les forces progressistes dans les pays du groupe de Visegrad (qui réunit la Slovaquie, la République tchèque, la Hongrie et la Pologne) où l’illibéralisme est de mise.

La Slovaquie est, depuis 1993, une république démocratique parlementaire, dont le président est élu pour cinq ans au suffrage universel direct et dispose de pouvoirs limités par rapport à l’exécutif. Le pays est membre de l’Union européenne depuis 2004 et le seul de la région à être dans la zone euro, mais il est très catholique et conservateur, c’est pourquoi l’élection largement gagnée de Zuzana Caputova marque un tournant. Pro- européenne, avocate libérale spécialiste des questions de protection de l’environnement, divorcée, favorable à l’avortement et au mariage pour tous, elle devient cheffe d’un pays à la traîne en Europe sur les droits des femmes.

En Slovaquie, les femmes sont encore à l’écart du champ politique : seulement trois femmes parmi les treize députés européens (alors que la moyenne dans l’ UE est de 36%de députées) ;21% de femmes  au Parlement slovaque, 25% au gouvernement, et 15% dans les assemblées régionales…Les conservateurs  et les souverainistes y sont puissants : ils ont récemment empêché la ratification de la convention du Conseil de l’Europe contre les violences faites aux femmes en affirmant que le texte, par ses références au genre, ouvrait  la voie au mariage homosexuel ; ils cherchent actuellement, à durcir la législation en vigueur afin de  contrôler strictement la presse et de restreindre les possibilités d’accès à l’avortement déjà très  réduites.

Zuzana Caputova a fait campagne pour la protection de l’environnement, le soutien aux personnes âgées, et une réforme de la justice visant à la dégager de toute influence politique. Mais c’est surtout son engagement résolu pour éradiquer la corruption qui lui a valu le soutien populaire. En effet, il y a un an, un jeune journaliste d’investigation Jan Kuciak et sa compagne étaient assassinés alors qu’il s’apprêtait à publier un article sur les liens présumés avec la mafia d’hommes politiques au pouvoir. Cela avait donné lieu à un vague d’émotion et d’indignation, et provoqué un mouvement de protestation massif auquel avait participé la nouvelle présidente, entraînant la démission du Premier Ministre et discréditant le parti au pouvoir.

C’est dire combien l’élection de Z. Caputova marque un sursaut moral et combien sa tâche sera difficile ; elle y fait face paisiblement en affirmant à l’issue de sa large victoire : « Pour moi, cette élection a prouvé que l’on peut gagner sans attaquer ses adversaires et je crois que cette tendance se confirmera lors des élections au Parlement européen et des législatives slovaques l’année prochaine ».